La mortalité par IDM et AVC pourrait être augmentée dans l’année qui suit l’interruption d’un THM ?

Les bénéfices cardio-vasculaires attribués initialement au traitement hormonal de la ménopause (THM) n’ont pas été confirmés par les essais contrôlés versus placebo comme HERS et WHI. De surcroit, une augmentation du risque d’évènements cardio-vasculaires est associée à l’initiation d’un THM, en particulier dans les essais de prévention secondaire. Cet effet est différent selon le délai depuis la ménopause. Il semblerait ainsi que chez les femmes jeunes, récemment ménopausées, l’impact du THM ne soit pas délétère sur les artères coronaires. De ce fait, les recommandations internationales et françaises proposent une utilisation du THM chez les femmes récemment ménopausées souffrant de troubles climatériques invalidants et cela avec les plus faibles doses efficaces et sur les plus courtes durées possibles.

Les estrogènes ont des effets directs cardio-vasculaires régulés par l’action génomique des RE2 qui activent la sécrétion d’agents vasodilatateurs comme l‘oxyde nitrique et les prostacyclines. Parallèlement, la décharge d’endothéline 1, le plus puissant vasoconstricteur, est diminuée. Ainsi, les estrogènes (endogènes mais aussi lors des THM) induisent une vasodilation avec baisse de la pression artérielle.

La question de l’arrêt d’un THM sur le risque cardio-vasculaire peut dès lors être posée et une étude scandinave publiée dans le dernier Journal of Clinical Endocrinology and Metabolism tente d’y répondre. Les auteurs utilisent les données des registres finlandais de remboursement des médicaments. Ils ont pu ainsi, suivre 332 202 femmes ayant interrompu leur THM entre 1994 et 2009. Ces femmes ont été suivies depuis la date de l’arrêt du THM jusqu’à la fin de l’année 2009. L’étude des registres des décès permettait de dénombrer les décès d’origine cardio-vasculaire dans cette cohorte et d’en comparer le taux à celui attendu par tranche d’âge de 5 ans : un SMR (Standardized Mortality Ratio) était ainsi défini.

Trois facteurs étaient particulièrement évalués : délai d’arrêt du THM (moins ou plus d’un an), la durée du traitement (plus ou moins de 5 années) et l’âge des femmes au début du THM (plus ou moins de 60 ans).

5 129 décès par IDM ou AVC sont survenus dans la période d’observation. La durée moyenne du THM était de 6,2 +/- 6,0 (SD) ans et le suivi après son arrêt de 5,5 +/- 3,8 (SD) ans.

La mortalité cardio-vasculaire à l’arrêt du THM était augmentée sans effet durée:

  •  la première année qui suivait l’interruption : SMR 2,28 (IC à 95% 2,2-2,34) ; avec une augmentation de la mortalité liée aux IDM (SMR 1,26 (IC à 95% 1,16-1,37)) et aux AVC (SMR 1,63 (IC à 95% 1,47-1,79)
  • principalement pour des THM débutés avant l’âge de 60 ans (SMR 1,74 (IC à 95% 1,37-2,19)
  •  surtout pour un arrêt avant l’âge de 60 ans (SMR 1,94 (IC à 95% 1,51-2,48)
  • comparativement aux femmes encore sous THM pour la mortalité cardiaque (SMR 2,30 (IC à 95% 2,12-2,50) et cérébrale (SMR 2,52 (IC à 95% 2,28-2,77)

Passée la 1ère année, la mortalité cardio-vasculaire était inférieure à celle attendue aussi bien sur le plan cardiaque que cérébral (quels que soient la durée et le délai d’arrêt).

Cette étude semble donc montrer une augmentation de la mortalité cardiaque et cérébrale la première année après l’arrêt des THM suivie d’une diminution de ces risques par la suite. Cependant plusieurs biais rendent extrêmement difficile l’interprétation de ces données. L’indice calculé (SMR) compare les chiffres de mortalité cardio-vasculaire à celle attendue dans une population générale où les femmes sont traitées ou non. Le motif d’interruption du THM n’est pas indiqué, ni les facteurs de risque vasculaire des femmes ayant stoppé leur THM, ni les modalités de l’arrêt (brutal ou progressif). Enfin, le délai d’observation avec un cut off à un an ne repose sur aucune base physiopathologique.

Le risque cardio-vasculaire lié aux hormones en général et aux THM en particulier est un élément fondamental de la prise de décision thérapeutique. La notion de fenêtre d’intervention est celle qui prédomine actuellement préconisant d’éviter d’instaurer un THM tardivement après l’installation de la ménopause. L’impact de la durée du THM est encore débattue et celui de son interruption mal évalué.  Dans l’état actuel des connaissances, la prudence reste de mise avec une mise en route des THM uniquement en cas de syndrome climatérique invalidant après évaluation globale de la fameuse balance bénéfices-risques.

 

Mikkola TS et al. Increased cardiovascular mortality risk in women discontinuing postmenopausal hormon therapy.  J Clin Endocrinol Metab. Doi : 10.1210/jc.2015-1864.

 
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