Contraception orale et impact osseux

L’acquisition du capital osseux avant l’âge de 30 ans est un déterminant essentiel de la masse osseuse et intervient de façon majeure dans la prévention des fractures post-ménopausiques. Le rôle des estrogènes dans la croissance et dans la maturation osseuse est fondamental en particulier au moment de la puberté. L’impact  de la contraception orale sur ce paramètre est diversement apprécié selon les études. Il semble établi que l’utilisation de la contraception orale en périménopause ou en cas d’aménorrhée hypothalamique améliore la densité osseuse. Les données de la littérature chez les adolescentes et les femmes jeunes semblent plus controversées. Alors que certaines études montrent un impact positif d’autres, à l’inverse, retrouvent un défaut d’acquisition de la masse osseuse. Ces discordances peuvent être attribuées à de nombreux facteurs : l’âge d’utilisation, le dosage des molécules utilisées, la composition des pilules, leur durée d‘utilisation …De plus, les changements de la densité osseuse à l’arrêt de la contraception orale sont également discutés.

Une équipe américaine a suivi sur 2 ans une cohorte d’adolescentes et jeunes femmes utilisant ou non la contraception orale afin d’évaluer les modifications de la densité minérale osseuse en fonction de l’âge, de la dose d’estrogènes et de la durée d’utilisation de la pilule ainsi que son évolution à l’arrêt.

Ainsi, 606 participantes ont pu être suivies : 389 utilisaient une contraception orale et 217 ne prenaient pas de pilule.  Dans cette cohorte on retrouvait 301 adolescentes âgées de 14 et 18 ans et 305 jeunes femmes entre 19 et 30 ans. Lors de l’entrée dans l’étude, parmi les participantes utilisant la pilule, 42% la débutait alors que 58% la prenait déjà. 38% utilisait une pilule dosée à moins de 30 ug d’EE alors que les autres employaient des préparations dosées entre 30 et 35 ug d’EE.  Un suivi était organisé tous les 6 mois sur 2 ans. 172 participantes arrêtèrent leur contraception orale durant le suivi.

Durant la période de suivi, les adolescentes qui n’utilisaient pas de pilule augmentaient  leur densité osseuse de 0.67%, 2.26% et 2.03% au niveau du col, des vertèbres et du corps entier respectivement.  Comparativement, parmi les adolescentes utilisant les pilules contenant 30 à 35 ug d’EE le gain osseux était significativement réduit au niveau vertébral et du corps entier. Chez celles qui débutaient la contraception orale lors de l’entrée dans l’étude, le gain osseux à 30 mois était moindre que pour les non utilisatrices qu’elle que soit la posologie utilisée. A l’arrêt de la pilule, un gain osseux était observé principalement pour les plus forts dosages de pilule et cela indépendamment de la durée de prise. 

Concernant les femmes jeunes, il ne semblait pas apparaitre de différences de la minéralisation osseuse quelque soit la dose et la durée et même en cas d’initiation de la pilule à l’entrée dans l’étude. Un an après l’arrêt de la pilule, les anciennes utilisatrices avaient une minéralisation osseuse vertébrale qui diminuait de 1.32% pour les pilules à moins de 30 ug et de 0.92%  pour les plus fortes comparativement à celles qui n’avaient pas utilisé la pilule chez lesquelles la minéralisation augmentait de 0.27%.

Cette étude prospective semble confirmer que les variations observées concernant l’impact osseux des pilules sont liées à leurs doses, durées et âge de leur utilisation.  Les adolescentes utilisant les plus forts dosages ont un gain osseux de 1% plus bas en moyenne que celles avec des dosages plus faibles ou sans pilules. Ces différences n’apparaissaient plus chez les femmes jeunes quelque soit le dosage de la pilule.

Le suivi reste court dans cette étude pour pouvoir donner des conclusions en termes de minéralisation à l’âge adulte et d’impact sur le risque fracturaire. De même, le rôle joué par la composante progestative de la pilule n’a pas été évaluée

Globalement il ne semble pas apparaitre d’influence majeure de la pilule sur le métabolisme osseux hormis chez les adolescentes lorsque de plus forts dosages sont utilisés. L’arrêt de la contraception orale est également suivi de modifications mineures. Il sera surement utile de vérifier sur le long terme l’impact de ces faibles variations sur la minéralisation osseuse et le risque fracturaire.

Scholes D, Hubbard R, Ichikawa L, LaCroix A, Spangler L, Beasley J, Reed S and Ott S. Oral contraceptive use and bone density change in adolescent and young women: a prospective study of age, hormone dose, and discontinuation. J Clin Endocrinol Metab, 2011 as doi:10.1210/jc.2010-3027

 
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