Confirmation de la supériorité du THM à la française en termes de risque thromboembolique !

Le risque thromboembolique veineux (TEV) est un élément essentiel à prendre en compte lors de la prescription d’un traitement hormonal de la ménopause (THM). En 2015, les recommandations du National Institute for Health and Care Exellence (NICE) distinguaient les différentes voies d’administration (orale ou transdermique) des estrogènes. Ce comité scientifique insistait cependant sur la nécessité de poursuivre les recherches notamment sur les différences de risque selon le progestatif utilisé lors des THM combinés. Une revue Cochrane publiée en 2017, basée principalement sur l’étude américaine WHI, concluait à une augmentation du risque TEV lors de l’utilisation de préparations estroprogestatives administrées par voie orale et en particulier l’association ECE et MPA. Des études françaises avaient rapporté des risques TVE moindre avec la voie transdermique d’administration de l’estradiol et l’utilisation de progestatifs proches de la progestérone naturelle.

D’autres types de THM existent et les études d’observation, résumées dans une méta-analyse publiée en 2015  dans le JCEM, n’ont pas suffisamment de puissance pour pouvoir analyser tous les types de THM.

Une étude cas témoins emboitée basée sur 2 vastes registres anglais vient d’être publiée dans le prestigieux British Médical Journal apportant des informations complémentaires et des confirmations importantes sur le risque thromboembolique de différents THM selon la voie d’administration des estrogènes et le type de molécule progestative associée.

Les 2 registres utilisés, provenant des cabinets de médecine générale, apportaient de précieuses données sur des cohortes de femmes âgées de 40 à 79 ans entre 1998 et 2017. Les cas d’évènements thromboemboliques étaient analysés ainsi que la prescription d’un THM avec toutes les précisions concernant les molécules, leurs dosages, voie d’administration et durée. La date de survenue représentait la date index. Les facteurs confondants y étaient également clairement identifiés en particulier le mode de vie, le tabagisme, l’IMC, l’histoire familiale, les comorbidités, les conditions à risque telles qu’un acte chirurgical…Tous les cas étaient appariés à des contrôles selon l’année de naissance et le praticien.

Ainsi, un total de 5 795 femmes ayant fait un VTE et 21 670 contrôles  avaient utilisé un THM dans les 90 jours précédant la date index. Plus de la moitié de ces évènements survenait après l’âge de 65 ans, et les femmes avaient plus de comorbidités (56% versus 36%) que les contrôles, plus de maladies cardio-vasculaires ou autres pathologies que les contrôles. Les femmes utilisant un THM étaient globalement plus jeunes, moins souvent obèses, avaient moins de comorbidités mais utilisaient plus d’antidépresseurs que les contrôles.

Les analyses selon le type de THM utilisé permettaient d’apporter les informations suivantes :

  • Le THM par voie orale est associé à une augmentation du risque VTE avec un odds ratio ajusté : 1.52 (IC à 95% 1.52-1.64), à la fois pour une estrogénothérapie seule avec un OR 1.40 (1.32-1.48) que pour les associations estroprogestatives avec un OR 1.73 (1.65-1.81) en comparaison aux femmes n’utilisant pas de THM.
  • L’estradiol (E2) par voie orale est associé à un moindre risque TE comparativement aux estrogènes conjugués équins (ECE) avec un OR : 0.85 (0.76- 0.95) pour une estrogénothérapie seule et OR 0.83 (0.76- 0.91) pour les associations estroprogestatives.
  • Le plus fort risque retrouvé concernait l’association ECE et acétate de médroxyprogestérone avec un OR 2.10 (1.92- 2.31) comparativement aux non utilisatrices.
  • Lorsque l’estrogène était administré par voie orale, le plus faible risque retrouvé concernait l’association E2 et dydrogestérone avec un OR 1.18 (0.98-1.42).
  • L’utilisation de préparations non orales (transdermique ou vaginale) n’était pas associée à une élévation du risque TE avec un OR 0.93 (0.87-1.01).
  • Les plus forts dosages en E2 transdermique (>50 microgrammes) conservent cette absence d’augmentation du risque.
  • Il ne semble pas apparaitre de différence de risque selon le régime d’administration du THM : séquentiel ou continu.
  • 91 jours après l’arrêt d’un THM, l’augmentation du risque VTE disparait.
  • L’utilisation de la tibolone ne semble pas associée à un surcroit de risque avec un OR 1.02 (0.90-1.15).
  • L’utilisation du raloxifène est associée à une augmentation du risque avec un OR 1.49 (1.24-1.79).

Cette vaste étude anglaise nous conforte dans nos pratiques françaises où le THM par voie transdermique et l’association à des molécules progestatives naturelles est largement privilégiée. Cette étude ne fournit, en revanche, pas de réponse sur l’utilisation de progestatifs (pregnanes ou norpregnanes) peu employés.

 Le risque VTE reste un élément essentiel de la balance bénéfice risque des THM, son évaluation et ré-évaluation au minimum annuelle s’imposent avant toute prescription ou reconduction thérapeutique.

 

Références :

Vinogradova Y, Coupland C, Hippisley-Cox J. Use of hormone replacement therapy and risk of venous thromboembolism : nested case-control studies using the QRechearch and CPRD databases. BMJ 2019 ;364 :k4810

 
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