Quelle prévalence de l’infection à HPV dans les cancers et les néoplasies intraépithéliales du pénis ?

Commentaire de l’article : Olesen TB, Sand FL, Rasmussen CL, Albieri V, Toft BG, Norrild B, Munk C, Kjær SK. Prevalence of human papillomavirus DNA and p16INK4a in penile cancer and penile intraepithelial neoplasia: a systematic review and meta-analysis. Lancet Oncol. 2019 Jan;20(1):145-158. doi: 10.1016/S1470-2045(18)30682-X.

Souvent considéré comme porteur sain, l’homme est aussi à risque de développement de lésions précancéreuses et de cancers au niveau anogénital et ORL. Dans leur article publié dans Lancet Oncology en janvier 2019, Olensen et collaborateurs, présentent les résultats d’une méta-analyse sur la prévalence des infections à papillomavirus, évaluée par la détection de leur génome ou indirectement par la mise en évidence d’une expression de p16, dans les cancers du pénis et les néoplasies intraépithéliales péniennes.

La compilation de données relatives à 4199 cas de cancers du pénis, répertoriés dans 52 études, a permis de rapporter une prévalence d’ADN d’HPV de 50,8 % (IC 95% 44,8-56,7 ; extrêmes de 11,6% à 100%). Dans la catégorie des cancers péniens associés aux HPV, telle que définie par l’organisation mondiale de la santé, et comprenant les cancers épidermoïdes basaloïdes, les carcinomes basaloïdes condylomateux et les carcinomes condylomateux, une prévalence d’ADN d’HPV de 72,7% a été calculée. Dans la catégorie des cancers péniens non associés aux HPV et comprenant les carcinomes épidermoïdes, les carcinomes verruqueux, les carcinomes papillaires et les carcinomes sarcomatoïdes, la prévalence d’ADN d’HPV a été estimée à 19,4 %. Au sein de chaque catégorie, la prévalence d’ADN d’HPV varie. Les carcinomes épidermoïdes basaloïdes sont les plus fréquemment associés à de l’ADN d’HPV (84 % des cas) et les carcinomes sarcomatoïdes sont le moins fréquemment associés à des HPV, seulement 10,5 % des cas. Concernant les néoplasies intraépithéliales, celles de bas grade (néoplasie intraépithéliale pénienne de grade 1 et condylomes dysplasiques) sont positives pour l’ADN d’HPV dans 98,6 % des cas, et celles de haut grade (néoplasie intraépithéliale pénienne de grade 2, 3 et carcinome in situ) sont associées aux HPV dans 80,5 % des cas. Les génotypes les plus fréquemment détectés sont l’HPV16 (68,3 %). L’HPV6 a été détecté dans 8,1 % des cas et l’HPV18 dans 6,9 % des cancers. C’est aussi l’HPV16 qui est le plus souvent détecté dans les néoplasies intraépithéliales.

Il existe aussi des différences de prévalence d’ADN d’HPV dans les cancers en fonction des régions géographiques. Les plus fortes prévalences sont observées en Afrique (87,5 % des cas sur une étude) et en Amérique du Sud (59,3 % des cas) et la plus faible en Asie (41,9 % des cas).

Concernant l’immunomarquage p16, les données ont été obtenues à partir de 2295 cas de cancers du pénis. Un marquage positif a été documenté dans 41,6 % des cas. Comme attendu, la catégorie des cancers associés aux HPV montre une plus forte positivité en p16 (85,8 %) que la catégorie des cancers non-associés aux HPV (17,1 %). Dans les lésions précancéreuses, la positivité en p16 a été estimée à 49,5 %.

Cette très grande méta-analyse a permis de mieux décrire l’épidémiologie des cancers du pénis et d’obtenir des résultats de prévalence plus robustes que les études antérieures. Elle donne par ailleurs une bonne estimation de la prévalence de l’infection par HPV dans les néoplasies intraépithéliales de bas et de haut grade. Elle nous donne aussi des indications sur la distribution des principaux types d’HPV dans les lésions du pénis et fait apparaître que l’HPV16 est très majoritaire (environ 70 % des cas HPV positifs). Malgré tout, les auteurs notent une grande hétérogénéité dans les résultats qu’ils ont exploités, hétérogénéité qu’ils non pas pu expliquer dans des analyses de sensibilité. Il n’en reste pas moins que ce travail confirme que la moitié des cancers et les ¾ des néoplasies intraépithéliales du pénis sont associés à des HPV, vaccinaux notamment, ce qui laisse supposer que la vaccination des garçons puisse être efficace contre ces lésions.