Alimentation et prévention des cancers

La nutrition peut beaucoup, mais elle ne peut pas tout. A une époque où l’on prône des réponses simples à des problématiques complexes, il est bon de faire l’état des connaissances.

Rappeler d’abord qu’il n’y a pas « les cancers » mais des cancers différents. Les processus de la cancérogenèse sont connus : initiation (par mutation), prolifération (promotion), puis extension. La mutagenèse est favorisée par des agents extérieurs (tabac, cannabis, amiante, rayonnements ionisants, UV, mycotoxines, virus, contaminants…) mais des facteurs génétiques, les oncogènes, sont des modulateurs de cette mutagenèse.

Pour qu’une mutation survienne, il faut une exposition répétée, tandis qu’à l’inverse, des facteurs nutritionnels peuvent s’opposer aux altérations oxydatives de l’ADN. L’étape de prolifération n’induit de cancer que si elle survient sur des cellules initiées, sinon elle aboutit à des fibromes ou des adénomes. Alcool, surpoids, facteurs de croissance, œstrogènes, acides gras, peuvent contribuer à la promotion. Une composante inflammatoire est souvent associée à ces étapes, de même que des remaniements vasculaires.

Mais ce sont les études épidémiologiques qui ont permis de mieux identifier les facteurs alimentaires éventuellement associés à la survenue des cancers, les études prospectives en particulier. Mais elles n’établissent qu’un risque, c’est-à-dire une probabilité, pas une certitude. Il est difficile de dresser l’inventaire détaillé et exhaustif, cancer par cancer, des facteurs mis en évidence, facteurs favorisants (négatifs) et facteurs protecteurs. Insister sur les seconds est pédagogique.

Classiquement, les cancers les plus clairement associés à une alimentation déséquilibrée sont les cancers colorectaux, avec un rôle protecteur majeur des aliments végétaux riches en fibres alimentaires via leur effet sur le microbiote, tandis que l’excès de viande rouge (plus de 500 g par semaine, comptée cuite) et de charcuterie (plus de 50 g par jour) exerce un effet négatif renforcé par les amines hétérocycliques et les hydrocarbures aromatiques polycycliques issues d’une cuisson inappropriée. Les produits laitiers, en particulier fermentés (yaourts), sont fortement protecteurs.

Les cancers hormonodépendants (sein, endomètre, prostate) semblent en partie liés au surpoids (après la ménopause pour le sein). La consommation d’alcool est associée à un risque accru de cancer du sein. Le soja, mais pas les compléments alimentaires à base de phyto-œstrogènes, serait protecteur. Certains contaminants sont en cause, par exemple le chlordécone pour le cancer de la prostate. A l’inverse, les crucifères contenant du sulforaphane (choux…) sont probablement protecteurs pour ce cancer.

Des études suggèrent un effet négatif d’une alimentation riche en aliments ultra-transformés ; si l’exposition directe des professionnels à certains pesticides est en cause, il n’y a pas de preuve formelle d’un bénéfice à l’alimentation issue de l’agriculture biologique, sauf peut-être pour certains lymphomes. L’activité physique est un facteur de prévention y compris de prévention tertiaire, notamment pour le cancer du sein et de la prostate. Une alimentation trop riche en aliments salés, séchés, fumés, favorise le cancer de l’estomac, tandis que les boissons trop chaudes celle du cancer de l’œsophage.

En bref, quels conseils peut-on donner ? En fait, le but est de mettre plus de chance de son côté, mais il n’y a pas d’aliment anti-cancer. Les compléments alimentaires « anti-oxydants » n’ont aucun effet positif démontré sur la prévention des cancers.

On recommande donc :
- une alimentation riche en fruits et légumes, en céréales complètes, en légumes secs,
- une modération de la viande rouge, en particulier grillée ou au barbecue, et de la charcuterie type bacon, saucisse,
- le maintien de produits laitiers notamment fermentés,
- une variété alimentaire avec des aliments simples, bruts, frais,
- le maintien d’un poids normal, stable,
- le maintien d’une activité physique régulière.

Le point positif de cette alimentation proche du « régime » méditerranéen est son effet également bénéfique pour les maladies cardiovasculaires et dégénératives. D’une pierre, deux coups !

 
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