Le point sur le cancer de l'endomètre

Auteurs

Généralités

Avec près de deux cent mille cas diagnostiqués par an, le cancer de l’endomètre est une cause majeure de morbidité et mortalité de la femme dans le monde ; il se place au 7ème rang des cancers les plus fréquents.

En France, le cancer de l’endomètre est le cancer gynécologique le plus fréquent, se situant au 5e rang des cancers chez la femme en termes d’incidence avec 6 560 nouveaux cas estimés en 2010 (1). Son incidence augmente avec l'âge et l'obésité. Entre 65 et 69 ans, ce taux est maximal, soit une incidence de 90 pour 100000. Ce cancer survient généralement après la ménopause. L’âge moyen des patientes lors du diagnostic est de 68 ans. Le diagnostic survient le plus souvent à un stade précoce car la maladie est symptomatique dans la majorité des cas, avec essentiellement des métrorragies post-ménopausiques motivant les patientes à consulter rapidement, ce qui permet une prise en charge rapide, et par conséquent une amélioration du pronostic. La survie relative à 5 ans est globalement de 76 % (2). A un stade localisé (près de 70 % des cas), elle passe à 95 %. Le nombre de décès secondaires à un cancer de l’endomètre était estimé à 1 900, en 2010 en France.

Classification

Les tumeurs épithéliales représentent 90% des tumeurs endométriales, parmi lesquelles la plupart sont en fait des adénocarcinomes endométrioïdes.

Les recommandations pour la pratique clinique pour le cancer de l’endomètre éditées par l’Institut National du Cancer (3) distinguent deux types histologiques de tumeur :

  • type 1 : tumeurs endométrioïdes pour lesquelles l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a défini 3 grades
     
  • type 2: carcinomes à cellules claires, carcinomes papillaires/séreux et Carcinosarcomes

Cette classification en grade des adénocarcinomes endométrioïdes permet, en association avec la stadification chirurgicale, d’établir trois groupes pronostiques en se basant sur la classification de l’European Society for Medical Oncology (4) : bas, intermédiaire et haut risque, sur lesquels repose l’attitude thérapeutique.

La FIGO a proposé une stadification anatomo-chirurgicale du cancer de l’endomètre qui repose sur le principe d’une prise en charge chirurgicale complète, comportant une hystérectomie totale avec annexectomie bilatérale avec lymphadénectomie pelvienne bilatérale et lombo-aortique (5). Cette démarche part du fait que la connaissance du statut ganglionnaire est un facteur pronostic essentiel dans le cancer de l’endomètre. Dans le cadre des dernières recommandations pour la pratique clinique (3), l’institut National du Cancer a proposé une classification selon le niveau de risque pour les tumeurs de stade FIGO I, associant à la classification FIGO, le type histologique et le grade, selon la classification de l’European Society for Medical Oncology (ESMO) (4). Celle-ci a pour but de déterminer la population pour laquelle on pourrait surseoir à la réalisation d’un geste ganglionnaire.

Les facteurs pronostiques

Les facteurs pronostiques principaux sont :

  • L’âge :
    Le pourcentage de décès et de récidives augmente avec l’âge. Le pronostic est lié à l’opérabilité qui diminue avec l’âge, alors que le taux de formes indifférenciées augmente. 
     
  • Le stade :
    La classification FIGO reflète la survie à 5 ans, qui varie en fonction des séries, mais se situe autour de 85% pour le stade I, 75% pour le stade II, 45% pour les stades III et 25% pour le stade IV de la maladie (6,7,8).
     
  • Le grade histologique 
  • Le grade 3 a une valeur pronostique péjorative pour tous les auteurs. Par ailleurs, il est lié aux autres facteurs pronostiques et représente un des facteurs principaux de récidives (7). 
     
  • Le degré d’infiltration du myomètre
     
  • L’envahissement ganglionnaire
     
  • Le type histologique
    Les cancers de l’endomètre d’un autre type histologiques que l’adénocarcinome endométrioïde, tels que les carcinomes séreux et à cellules claires représentent environ 10% de tous les cancers de l'endomètre, mais sont responsables de plus de 50% des récidives et des décès (9,10,11,12).
     
  • Autres facteurs :  
    • Les emboles vasculaires
    • Les récepteurs hormonaux (les tumeurs bien différenciées sont riches en récepteurs, tandis que les anaplasiques en sont dépourvus) 
    • L’index d’ADN > 1,5 et l’aneuploïdie sont des facteurs de mauvais pronostic

Les facteurs non histo-pathologiques : race, diabète, parité

Le bilan

Le bilan complémentaire doit permettre de faire à la fois le diagnostic de certitude et le bilan d’extension. Le diagnostic de cancer de l’endomètre repose sur une preuve histologique qui peut être obtenue sur une biopsie d’endomètre en consultation, lors d’un curetage biopsique ou lors d’un prélèvement réalisé au cours d’une hystéroscopie opératoire, cette étape sera dépendante du contexte.

Il est par ailleurs impossible à ce jour de se passer d’une IRM pour le bilan d’un cancer de l’endomètre.L’IRM abdomino-pelvienne est l’examen le plus pertinent dans l’évaluation pré-thérapeutique d’un cancer de l’endomètre. Elle permet d’évaluer l’extension loco-régionale de la tumeur en termes de profondeur d’envahissement du myomètre, d’atteinte du col de l’utérus, du vagin, des annexes, de la paroi vésicale ou rectale. Cet examen permet aussi une évaluation du statut ganglionnaire, à la fois pelvien et lombo-aortique (13). Par ailleurs, l’IRM est supérieure à l’échographie et au scanner pour évaluer l’envahissement cervical, mais n’est cependant pas capable d’identifier l’envahissement muqueux superficiel, mieux évalué par l’hystéroscopie (14).

Les moyens thérapeutiques

  • Chirurgie
    La chirurgie est le traitement de référencedu cancer de l’endomètre pour les stades précoces. La chirurgie standard comporte une hystérectomie totale avec salpingo-ovariectomie bilatérale et cytologie péritonéale. La réalisation de gestes supplémentaires (lymphadénectomie pelvienne +/- lombo-aortique, omentectomie) dépend du stade clinique, du type histologique et du grade. La balance bénéfices/risques (âge, comorbidités, obésité morbide) de ces gestes supplémentaires immédiats ou différés peut y faire renoncer.
     
  • Radiothérapie
    L’irradiation peut-être réalisée par radiothérapie externe et/ou par curiethérapie. Ces deux techniques sont utilisées en tant que traitement adjuvant post-opératoire dans la majorité des cas. Les objectifs respectifs de la curiethérapie et de la radiothérapie externe sont la prévention des récidives vaginales, et la prévention des récidives pelviennes.
     
  • Chimiothérapie
    La chimiothérapie est le plus souvent proposée en traitement adjuvant. Le protocole le plus couramment utilisé est l’association carboplatine/paclitaxel.
     
  • Hormonothérapie
    Il n’y a pas d’indication standard à un traitement par hormonothérapie dans la prise en charge du cancer de l’endomètre.En situation métastatique, elle peut être indiquée lorsque la chimiothérapie n’est pas applicable ou en cas de maladie lentement évolutive avec récepteurs hormonaux positifs.

Stratégie thérapeutique

La prise en charge thérapeutique des cancers de l’endomètre repose initialement sur la chirurgie, quiest le traitement de référence initial des cancers de l’endomètre, notamment des stades précoces ; 92 à 96 % des patientes bénéficient d’une chirurgie première (15). Le but du traitement chirurgical est double : d’une part, il permet d’assurer le contrôle loco-régional de la maladie, d’autre part, il fournit les informations pronostiques. L’intervention doit comporter une cytologie péritonéale, une inspection complète de la cavité abdomino-pelvienne, une hystérectomie totale non conservatrice extrafasciale associées ou non à une lymphadénectomie pelvienne, voire lombo-aortique et une omentectomie.

Les indications de curage pelvien et lombo-aortique dépendent du risque d’envahissement ganglionnaire évalué sur la biopsie pré-opératoire (type histologique et grade tumoral) ainsi que l’imagerie pré-opératoire (profondeur d’infiltration myométriale).

Les indications de traitements adjuvants dépendent de l’ensemble des facteurs pronostiques. 

Les séquences de traitement doivent être décidées au cas par cas, au cours de réunion de concertation pluridisciplinaire.

Concernant l’acte chirurgical, la voie d’abord recommandée pour les stades I est la voie cœlioscopique ou cœliovaginale. La voie vaginale exclusive est réservée aux patientes à très haut risque chirurgical. La laparotomie reste indispensable en cas de gros volume tumoral ou de conditions anatomiques particulières (échec ou contre-indication de coelioscopie, adhérence massive, etc.). Il convient d’éviter le morcellement de la pièce opératoire.

La chirurgie est le traitement de référence initialdes cancers de l’endomètre, notamment des stades précoces. Le but du traitement chirurgical est double : d’une part, il permet d’assurer le contrôle loco-régional de la maladie, d’autre part, il fournit les informations pronostiques.

Voie d’abord chirurgical : de la laparotomie à la cœlioscopie robot-assistée

La voie d’abord de référence a longtemps été la laparotomie médiane. Depuis le début des années 1990 (16), la cœlioscopie est devenue une alternative valide, mais qui peine à se répandre à cause de sa pénibilité et de sa difficulté d’apprentissage. C’est dans ce contexte qu’a émergé la chirurgie robotisée.

1. La laparotomie

Jusqu’à l’émergence de la cœlioscopie, la voie d’abord dans la prise en charge du cancer de l’endomètre était la laparotomie. Cette voie d’abord présente de nombreux inconvénients en termes de préjudice esthétique (grande cicatrice), de complications post-opératoires (infectieuses, digestives avec risque d’éventration et d’occlusion, thrombo-emboliques..), de récupération post-opératoire qui est longue, de coûts liés à une durée d’hospitalisation longue et un retour à une vie sociale « normale » et une reprise d’activité normale tardifs. C’est dans ce contexte que la chirurgie mini-invasive, avec la cœlioscopie en premier plan, a détrôné la laparotomie.

Malgré tout, il persiste encore des indications immuables à réaliser une laparotomie dans le traitement de cette pathologie :

  • Contre-indication à la cœlioscopie (insuffisance respiratoire, insuffisance cardiaque par exemple) ;
  • Abdomen multi-opéré avec risque adhérentiel trop important ;
  • Utérus trop volumineux ne pouvant être extrait par voie vaginale ;
  • Extension loco-régionale de la maladie trop importante mais accessible à une chirurgie de cyto-réduction.

2. Voie vaginale

Elle n’est pas indiquée sur un plan carcinologique, mais peut cependant être réalisée en cas de très haut risque chirurgical, notamment chez la femme très âgée, et qui plus est obèse. Sa réalisation prive le chirurgien de l’exploration intra-abdominale avec son inspection et la réalisation des gestes ganglionnaires.

3. La cœlioscopie

a. Généralités

La fin des années 80 a été marquée par l’émergence de la cœlioscopie en cancérologie gynécologique. Les équipes pionnières dans ce domaine, et en particulier les équipes françaises, ont introduit progressivement cette technologie dans leur pratique.  Cette technique a d’ailleurs, dans un premier temps, fait ses preuves en chirurgie gynécologique pour la prise en charge de pathologies bénignes, avant de s’étendre à toute la gynécologie, puis à d’autres spécialités telles que l’urologie, la chirurgie viscérale ou la chirurgie thoracique et vasculaire.

L’apparition de la chirurgie cœlioscopique a permis l’introduction d’un nouveau concept, celui de la chirurgie mini-invasive, à savoir une chirurgie visant à traiter tout en minimisant les traumatismes opératoires. Les objectifs de la chirurgie mini-invasive sont ainsi de diminuer les saignements opératoires, de diminuer les complications post-opératoires (principalement infectieuses et thrombo-emboliques), de diminuer les séquelles post-opératoires, notamment les adhérences ou en encore les séquelles esthétiques liées à la cicatrice, de diminuer la douleur post-opératoire, de réduire les durées d’hospitalisation et le délai de reprise d’activité, permettant ainsi de réduire les coûts dans le même temps.

L’utilisation de la cœlioscopie dans la prise en charge du cancer de l’endomètre avait donc la prétention d’obtenir des résultats équivalents en termes de survie globale et de survie sans récidive, mais avec un impact diminué sur la morbidité, sur le retentissement global de cette chirurgie et sur la durée d’hospitalisation et de réhabilitation (17).

Elle est devenue actuellement la technique de référence dans la prise en charge des cancers de l’endomètre de stade précoce, pour les centres en ayant l’expérience.

L’aspect ergonomique du geste cœlioscopique constitue certainement un des facteurs limitant sa diffusion au sein de la communauté chirurgicale. Cet aspect de la technique est étroitement lié à la courbe d’apprentissage.

b. Bénéfices démontrés de la cœlioscopie par rapport à la laparotomie

Dans les stades précoces de cancer de l’endomètre, 6 études randomisées ont montré que la voie d’abord cœlioscopique permettait, par rapport à la voie d’abord chirurgicale classique par laparotomie, des pertes sanguines moins importantes, une durée d’hospitalisation plus courte, une reprise de l’activité plus précoce et au final une meilleure qualité de vie (17-22).  La méta-analyse de Woong (23) et al qui reprend toutes les séries comparant ces deux voies d’abord chirurgicales dans le cancer de l’endomètre retrouve un taux de complications moins important dans le groupe cœlioscopie par rapport à la laparotomie.

Un des avantages spécifiques de la cœlioscopie est de permettre une prise en charge moins morbide des patientes obèses, avec la même qualité de prélèvements et les avantages de la cœlioscopie chez ces patientes à risque. O’Gorman et al. (24) ont démontré la faisabilité du traitement coelioscopique exclusif chez 34 patientes présentant une obésité morbide, avec une durée d’hospitalisation moyenne de 4 jours. Par ailleurs, Caquant et al. (25) ont montré que le stadification chirurgicale cœlioscopique (hystérectomie et curages pelviens) était réalisable dans la population obése.

On a par ailleurs montré que la coelioscopie ne semble pas avoir d’effet délétère spécifique en oncologie (diffusion péritonéale, métastases à distance, métastases cicatricielles), si les règles de chirurgie oncologique sont respectées.

Au total, l’abord cœlioscopique permet une stadification complète (hystérectomie et curages pelviens +/- lombo-aortique) dans la majorité des cas à la différence de la laparotomie, avec un nombre de ganglions pelviens prélevés au moins comparable à la laparotomie, une durée d’hospitalisation plus courte et finalement une durée opératoire qui semble peu différente par rapport à la laparotomie quand elle est réalisée par une équipe chirurgicale expérimentée. 

c. Inconvénients de la coelioscopie

Si beaucoup de progrès techniques ont permis au chirurgien de mieux voir et d’être plus performant, permettant de réaliser des procédures de plus en plus complexes (hystérectomies élargies, curages pelviens et lombo-aortique), ce type de chirurgie lui impose des positions statiques prolongées et des positions extrêmes (rotation du tronc, haut du corps penché en avant, bras surélevés…), responsables de douleurs dans les membres supérieurs, le dos et les membres inférieurs (26,27) lors de procédures longues.

Il en résulte que les procédures de cœlioscopie « avancées » (telle que la lymphadénectomie ou l’hystérectomie élargie) nécessitent en effet un apprentissage long et chronophage, pouvant être à l’origine, pendant cette phase, d’une morbidité per-opératoire plus importante.

Ainsi, même si les bénéfices de la prise en charge par coelioscopie sont réels et prouvés scientifiquement, ce depuis plus de vingt ans, seuls 9 à 25 % de la chirurgie des cancers gynécologiques (col et endomètre) en France sont faits par cette voie (28).

d. De la cœlioscopie simple à la cœlioscopie robot-assistée

Le chirurgien a une certaine difficulté à quitter le contrôle direct (par ses mains) des instruments que lui confère la voie ouverte (laparotomie) expliquant en partie la mauvaise pénétrance de la cœlioscopie en chirurgie, même si ses avantages sont maintenant démontrés.

Aussi, l’arrivée depuis 10 ans de l’assistance robotisée représente une évolution majeure dans le développement de cette chirurgie mini-invasive, grâce à ses atouts essentiels : le contrôle direct des instruments, la disparition des gestes parasites (par la démultiplication des mouvements) et la vision en 3 dimensions.

Elle est cependant victime de son coût et du faible recul concernant les résultats thérapeutiques.

4. La cœlioscopie robot-assistée

a. Généralités

Plus qu’une révolution chirurgicale, cette technologie constitue une évolution majeure de la cœlioscopie conventionnelle, et semble par ses atouts, pouvoir constituer un axe de développement de la chirurgie minimale invasive.

Il s’agit donc d’un télé-opérateur offrant, une position de travail confortable, où le chirurgien est assis avec les avant-bras posés sur un repose-bras, une liberté de mouvement des extrémités des instruments comparable à celle d’un poignet humain et une vision du champ opératoire en 3 dimensions.

Mais au delà de la prouesse technique, il est nécessaire de valider l’intérêt que peut avoir ce matériel dans la prise en charge de nos patientes, tant sur le plan thérapeutique (faisabilité et bénéfice), que technique, en offrant un accès plus facile à un geste chirurgical mini-invasif.

b. Avantages pour le chirurgien

En 2001, la FDA (Food Drug administration) approuve l’utilisation de la cœlioscopie robot-assistée en chirurgie abdominale aux USA. Il s’agit d’une cœlioscopie (cicatrices minimes comparables) dont les instruments sont pilotés à distance par le chirurgien au moyen d’une console.

Le robot Da Vinci (Intuitive Surgical) permet une vision en 3D, des gestes plus précis (sans tremblement, les gestes imprimés par le chirurgien étant démultipliés) grâce aux instruments articulés, avec un confort accru du chirurgien qui est assis. 

En effet, la position assise et les bras appuyés sur un appui bras sont des éléments qui limitent les positions statiques prolongées et les positions extrêmes de la cœlioscopie, responsables de douleurs dans les membres supérieurs, le dos et les membres inférieurs. De plus, l’axe des mains et du regard est le même, à la différence de la cœlioscopie conventionnelle où les mains travaillent dans un sens et le regard est fixé sur un écran le plus souvent situé en face du chirurgien, dans un autre axe.

La courbe d’apprentissage semble plus courte que celle de la coelioscopie conventionnelle (29-33).

Hoekstra et al rapportent leur première année d’expérience avec la cœlioscopie robot-assistée dans leur centre d’onco-gynécologie. La proportion de patientes ayant bénéficié d’une chirurgie mini-invasive pour le cancer de l’endomètre est passée en 1 an, avec l’arrivée de la cœlioscopie robot-assistée, de 3,3% à 43,5%. La formation des jeunes médecins à la cœlioscopie robot-assistée dans ce centre a progressé de 45% à 92% en 1 an (34). 

Par ses avantages, l’assistance robotisée pourrait permettre une plus grande diffusion de la cœlioscopie auprès des chirurgiens et permettre ainsi le développement de la chirurgie mini-invasive dans la prise en charge des cancers gynécologiques. 

c. Avantages pour les patientes

Plusieurs études ont comparé la voie d’abord cœlioscopique classique à la cœlioscopie robot-assistée. Dans le cancer de l’endomètre, des études comparatives rétrospectives ou prospectives uni ou multicentriques ont rapporté les données périopératoires de la cœlioscopie robot-assistée par rapport à la cœlioscopie traditionnelle. Bien que les données soient très variables d’une équipe à l’autre, on retrouve beaucoup d’arguments en faveur de la cœlioscopie robot-assistée, en terme de bénéfices pour les patientes (durée opératoires, pertes de sang, complications post-opératoires) avec des résultats carcinologiques similaires.

Nous travaillons sur le sujet pour notre part, dans le service de chirurgie gynécologique à l’Hôpital Européen Georges Pompidou, et proposons aux patientes atteintes d’une pathologie tumorale gynécologique éligibles à une prise en charge par coelioscopie, une prise en charge par chirurgie robotisée. Nous avons publié un essai comparatif entre coelioscopie conventionnelle et chirurgie robotisée concernant les complications post-opératoires à court et moyen terme ne retrouvant pas de différence statistiquement significative entre les deux groupes (35) ; on note cependant qu’il n’y a aucune complication peropératoire dans le groupe robot versus n=10 dans le groupe coelioscopie. Nous avons par ailleurs réalisé un autre travail, en cours de publication, traitant des résultats carcinologiques, et il semblerait, comme le suggère la littérature, qu’il n’y ait pas de différence en terme de survie globale et survie sans récidive.

Les auteurs montrent que dans certains centres, l’apport de la coelioscopie robotisée a permis d’offrir une chirurgie mini-invasive à un plus grand nombre de patientes que lorsqu’il n’y avait le choix qu’entre la coelioscopie conventionnelle et la laparotomie. Une explication de l’augmentation rapidement croissante du robot, outre la courbe d’apprentissage semblant plus rapide, est probablement liée à la prise en charge des patientes obèses. En effet, même si la coelioscopie a permis de diminuer nettement la morbidité dans ce groupe de malades, il n’en reste pas moins une technique difficile, dans des conditions difficiles, réservée à des opérateurs entrainées. Or, une fois le robot installé, il paraît évident que le chirurgien se libère d’une partie des contraintes « physiques » qu’impose la coelioscopie conventionnelle dans la prise en charge de ces patientes. L’obésité étant un facteur de risque du cancer de l’endomètre, cette remarque prend alors tout son sens. Des travaux ont été réalisés en traitant de manière spécifique la population obèse ; il en résulte que la chirurgie assistée par robot par rapport à la cœlioscopie conventionnelle permet une réduction du temps opératoire, des pertes sanguines, et une augmentation du nombre de ganglions prélevés (36).

Malgré les investissements importants que cette technologie nécessite et l’absence d’essai randomisé par rapport à la cœlioscopie conventionnelle, la cœlioscopie robot-assistée prend de l’ampleur en Amérique du Nord, où elle tend à se substituer à la laparotomie dans des équipes non entraînées à la cœlioscopie (90% des prostatectomies radicales sont réalisées par assistance robotisée et 40% des hystérectomies réalisées pour cancer).  Son bénéfice ne réside probablement pas dans sa supériorité par rapport à la coelioscopie, mais dans l’élargissement de l’accessibilité à une chirurgie mini-invasive pour des patientes nécessitant une prise en charge chirurgicale.

d. Limites et contraintes de la chirurgie robotisée

Même s’ils sont peu évoqués dans la mesure où les auteurs vont plutôt dans le sens de la promotion de cette chirurgie, certains défauts sont inhérents à la chirurgie robotique.

Tout d’abord, concernant l’installation, il n’est pas possible de modifier le degré d’inclinaison de la table (donc le degré de Trendelenburg) sans déconnecter l’appareil. Il est en de même lorsque l’opérateur veut changer d’installation, comme pour passer d’un temps pelvien à un temps lombo-aortique ; la cœlioscopie simple est plus souple et ergonomique en cas de changement de stratégie opératoire.

Par ailleurs, la force de préhension et l’absence de retour de force requièrent une certaine acclimatation, le risque de déchirure et de lésion tissulaire étant certains sans maîtrise de ces éléments.

L’isolement de l’opérateur peut aussi être un problème, et ce d’autant plus que le champ d’action de l’aide-opératoire est très limité par l’espace occupé par le robot.

Enfin, le coût est finalement le facteur limitant le plus important, avec un prix initial de 2 millions d’euros, et un prix lié au matériel de 1300 euros par intervention.

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