Effets protecteurs du tamoxifène dans les inductions d’ovulation chez des patientes présentant un cancer du sein hormono-dépendant

E.M.E. BALKENENDE et coll. (Département de Gynécologie Obstétrique, Institut de Cancer des Pays-Bas, Amsterdam) analysent les effets du traitement de Tamoxifène, administré en cours d’induction d’ovulation chez des patientes présentant un cancer du sein avec récepteurs à l’œstrogène positifs (ER+).

Le cancer du sein représente un des cancers les plus retrouvés chez les patientes en âge de reproduction, selon l’étude réalisée par BREY en 2012. La plupart des cancers chez les patientes jeunes nécessitent un traitement de chimiothérapie qui a un effet délétère sur la fonction ovarienne, notamment les traitements alkylants comme la Cyclophosphamide.

La cryopréservation des ovocytes ou des embryons est un moyen permettant la conservation de la fertilité chez ces patientes.

Les traitements d’induction d’ovulation sont nécessaires afin d’obtenir un nombre suffisant d’ovocytes en vue, soit d’une cryopréservation, soit dans le cadre d’une fécondation in vitro avec cryopréservation embryonnaire.

Pour une période d’au moins 2 semaines, les patientes auront un traitement avec des doses élevées d’hormone FSH associée à des analogues de la Lh-Rh : ce traitement entraînera des pics d’œstradiol de 2 à 3 fois supérieurs aux taux hormonaux retrouvés dans un cycle spontané, d’où le risque potentiel sur la multiplication des cellules cancéreuses en cas de lésions ER+.

Les auteurs évoquent donc l’intérêt d’administrer à titre préventif du Tamoxifène, un anti-œstrogène non-stéroïdien qui, après administration orale, a plusieurs métabolites, dont l’endoxifène : ces métabolites actifs, et notamment l’endoxifène, sont potentiellement capables de moduler les récepteurs à œstrogène et de réduire leur croissance au niveau des cellules mammaires.

Dans cette étude prospective, 4 patientes présentant un cancer du sein ER+, ont été traitées par induction d’ovulation en vue d’une cryopréservation d’ovocytes avec en complément un traitement par Tamoxifène, à raison d’une dose de 60 mg par jour : le but était également de savoir si les doses de Tamoxifène permettaient d’obtenir, au niveau plasmatique, des niveaux d’endoxifène suffisants pour obtenir l’effet préventif recherché.

Dans une étude prospective antérieure (OKTAY – 2005), trois protocoles de stimulation avaient été comparés chez 29 patientes présentant un cancer du sein : association lors de l’induction d’ovulation au Tamoxifène, association au Letrozole, ou Tamoxifène utilisé isolément : l’association d’induction d’ovulation et de Tamoxifène donnait des niveaux d’œstradiol significativement plus élevés (1180 pg/ml) à ceux retrouvés dans les traitements de Letrozole (taux d’œstrogène : 380 pg/ml) mais les auteurs n’avaient pas retrouvé de différence significative en termes d’évolution du cancer du sein après 18 mois de surveillance.

Dans cette étude, les 4 patientes devant recevoir une chimiothérapie ont toutes choisi un protocole de cryopréservation ovocytaire avant la chimiothérapie, leur moyenne d’âge était de 26,5 années, 5 protocoles d’induction d’ovulation
(3 protocoles de stimulation longue avec désensibilisation préalable par analogues de la Lh-Rh, 2 protocoles de stimulation courte) ont été utilisés : le nombre moyen d’ovocytes vitrifiés était de 11.

Le traitement par Tamoxifène à raison de 60 mg par jour était administré dès le début du traitement par FSH ou dès le début de la désensibilisation hypophysaire.

Les taux de Tamoxifène et du métabolite endoxifène étaient analysés de façon quotidienne, jusqu’au prélèvement ovocytaire.

Résultats :

Les auteurs retrouvent une grande variabilité des dosages de Tamoxifène et d’endoxifène au niveau plasmatique : les taux d’endoxifène retrouvés variaient entre 3,9 et 41 μg/ml, selon l’étude de MADIENSKY (2011), les taux d’endoxifène considérés comme protecteurs pour l’inhibition des récepteurs à œstrogène sont de l’ordre de 7 μg/ml.

Les auteurs notent que lorsque le Tamoxifène était administré préalablement au traitement d’induction d’ovulation, on retrouve au niveau plasmatique des taux plus élevés de Tamoxifène et d’endoxifène.

Les auteurs rappellent que l’alternative au traitement par Tamoxifène est l’utilisation du Letrozole, dont l’action sur la diminution des pics d’œstrogène en cours de traitement d’induction d’ovulation, a également été prouvée dans des études antérieures.

Sur la base de ces premiers résultats, les auteurs concluent en l’efficacité thérapeutique du Tamoxifène et notamment la production suffisante du métabolite actif sur la réduction des récepteurs à l’œstrogène par l’endoxifène, dans le cadre de traitements d’induction d’ovulation réalisés en préservation de fertilité chez des patientes présentant un cancer du sein avec récepteurs à l’œstrogène positifs.

 

A prospective cases series of women with estrogen receptor-positive breast cancer : levels of  tamoxifen metabolites in controlled ovarian stimulation with high-dose tamoxifen – E.M.E. BALKENENDE et coll. – Human Reproduction – Volume 28 n° 4 pp 201a

 
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