Comparaison du devenir materno-fœtal des accouchements programmés à domicile et des accouchements programmés en maternité : une méta-analyse

Lecture critique de l’article :
Joseph R. Wax et al. Maternal and newborn outcomes in planned home birth vs planned hospital births : a metaanalysis. Am J Obstet Gyn 2010;243e1-8.

Xavier Carcopino
Service de Gynécologie Obstétrique
Hôpital Nord
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Voici une méta-analyse dont l’objectif est d’évaluer le devenir materno-fœtal des grossesses pour lesquelles un accouchement à domicile a été planifié.

Cette équipe américaine du Maine a inclus 12 études, dont 4 études prospectives et un essai randomisé. Au total, ce sont 342056 accouchements planifiés à domicile et 207551 accouchements planifiés en maternité qui ont pu être analysés. Concernant la mortalité maternelle, seules 4 des 12 études sélectionnées évaluaient ce paramètre sans avoir rapporté de cas de décès maternel dans les deux groupes soit sur 10997 et 28501 accouchements à domicile et en maternité, respectivement.

Concernant la gestion de l’accouchement, on note, chez les femmes ayant planifié leur accouchement à domicile, une diminution significative de l’utilisation de l’analgésie péridurale (Odds Ratio (OR) : 0,24 ; Intervalle de confiance à 95 % (IC à 95 %) : 0,22-0,25), de l’enregistrement du rythme cardiaque fœtal pendant le travail (OR : 0,1 ; IC à 95 % : 0,09-0,10), de la pratique de l’épisiotomie (OR :0,26 ; IC à 95 % : 0,24-0,28), des naissances par extraction instrumentale (OR : 0,26 ; IC à 95 % : 0,24-0,28) et par césarienne (OR : 0,42 ; IC à 95 % : 0,39-0,45).

L’analyse met également en évidence une diminution significative de la morbidité maternelle chez les femmes ayant planifié leur accouchement à domicile. En particulier celles-ci présentent significativement moins de déchirures périnéales du troisième de gré ou plus (OR : 0,38 ; IC à 95 % : 0,33-0,45), d’infections (OR : 0,27 ; IC à 95 % : 0,19-0,39), d’hémorragies de la délivrance (OR : 0,66 ; IC à 95 % : 0,61-0,71), de déchirures vaginales et périnéales et de rétention placentaire. Au final, seul le risque de procidence du cordon n’apparaît pas comme significativement différent entre les deux groupes.

Concernant le devenir périnatal et néonatal de ces nouveaux-nés, l’analyse met en évidence un taux significativement plus faible d’accouchement prématuré et de petit poids de naissance (< 10 % ou < 2500 g) chez les femmes ayant choisi d’accoucher à domicile par rapport à celles ayant un accouchement planifié en maternité : OR : 0,72 ; IC à 95 % : 0,55-0,96 et OR : 0,50 ; IC à 95 % : 0,50-0,71, respectivement. S’il n’apparaît pas de différence significative entre ces deux groupes pour ce qui est du risque de macrosomie ou de ventilation néonatale, le risque de dépassement de terme avancé (= 42 SA) apparaît comme significativement plus fréquent chez les femmes ayant choisi d’accoucher à domicile. Enfin, si cette méta-analyse ne retrouve pas d’augmentation de la mortalité périnatale chez les femmes ayant choisi d’accoucher à domicile, la mortalité néonatale est lui significativement augmenté, que ce soit à l’analyse de toutes les naissances (OR : 1,98 ; IC à 95 % : 1,19-3,28) ou à l’analyse des naissances pour lesquelles aucune anomalie n’a été notée (OR : 2,87 ; IC à 95 % : 1,32-6,25).

Cette méta-analyse apporte des informations capitales sur le risque d’un accouchement planifié à domicile. Sa grande force est d’avoir appliqué des critères de sélection strictes des études et en particulier d’avoir sélectionné des études pour lesquelles n’étaient inclus que des accouchements à domicile planifiés et non pas survenus à domicile sans avoir de notion sur sa planification préalable et donc potentiellement inopinés. Néanmoins, on aurait aimé connaître le taux de ces grossesses ayant finalement accouché en maternité ou ayant dû être transférées en cours de travail ou en post-partum immédiat vers la maternité la plus proche. Mais la principale critique à formuler à l’égard de cette méta-analyse est la manifeste différence entre les caractéristiques des groupes comparés.

On peut effectivement s’attendre à ce que, à la différence des grossesses pour lesquelles l’accouchement est prévu en maternité, des femmes ayant choisi d’accoucher à domicile aient des grossesses d’évolution normale sans aucun paramètre péjoratif. Ces différences sont d’ailleurs évoquées par les auteurs dans la discussion. Ainsi, les femmes ayant un accouchement planifié à domicile étaient significativement moins souvent obèses, qu’il y avait moins de nullipares, moins d’utérus cicatriciels et qu’elles avaient moins d’antécédents obstétricaux que les autres.

Ce point est capital pour l’interprétation des résultats concernant les éléments de la gestion du travail et de la morbidité maternelle dans le groupe des femmes ayant choisi d’accoucher à domicile. Il est effectivement probable que ces chiffres soient simplement expliqués par un contexte obstétrical plus favorable pour des patientes préalablement sélectionnés. On peut par contre s’interroger sur la diminution observée du risque infectieux.

Finalement, cet article apporte des données essentielles sur l’augmentation de la mortalité néonatale de ces grossesses. Celui-ci est deux fois plus élevé chez des patientes ayant choisi d’accoucher à domicile que chez les autres et devient quasiment 3 fois plus élevé pour les accouchements sans anomalie rapporté. Ce point est à retenir pour l’information à donner aux patientes envisageant ce mode d’accouchement.

Pour en savoir plus :

  • Joseph R. Wax et al. Maternal and newborn outcomes in planned home birth vs planned hospital births : a metaanalysis. Am J Obstet Gyn 2010;243e1-8.
  • Kennare RM, Keirse M, Tucker GR, Chan AC. Planned home and hospital births in South Australia, 1991-2006: differences in outcomes.Med J Aust 2010;192:76-80.

 
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