Fécondation In Vitro et risques de cancers gynécologiques et mammaires : étude rétrospective menée au sein du service de santé Israelien

Cette étude menée par Louise A. BRINTON, Eitan LUNENFELD et coll. (National Cancer Institute, Maryland - USA ; Service d’Epidémiologie du Maccabi Healthcare Services, Faculté de TEL-AVIV, Israël) porte sur 87403 patientes suivies et/ou traitées pour infertilité depuis septembre 1994.

La surveillance de survenue d’une lésion cancéreuse (mammaire ou gynécologique) a été réalisée jusqu’en juin 2011.

La relation entre infertilité, traitement d’induction d’ovulation et risques de cancer, a fait l’objet de très nombreuses études :

  • WHITEMORE (1992), ROSSING (1994) avaient évoqué l’augmentation de survenue de lésions ovariennes liées à l’utilisation de traitements inducteurs d’ovulation.
  • Ces données n’avaient pas été confirmées dans la dernière méta-analyse menée par L.A. BRINTON (2012).

Beaucoup d’études ont, par ailleurs, été critiquées du fait des difficultés à tenir compte des paramètres susceptibles de biaiser les résultats, notamment ceux liés aux causes de l’infertilité, ou à la parité des patientes.

Dans la population étudiée dans cet article, à travers les registres de la « Health Maintenance Organization » d’Israël  (HMO), les auteurs ont ressorti les critères socio-économiques et médicaux, notamment des facteurs de risques de cancer (nulliparité, surcharge pondérale, tabac…), exposition à des traitements hormonaux pondérales, traitements de fécondation in vitro (FIV)…

Six principales indications d’infertilité ont été analysées :

  • infertilité masculine,
  • anovulation,
  • causes « mécaniques »
  • syndrome d’ovaire polykystique
  • endométriose
  • trouble hypothalamo-hypophysaire.

Résultats :

  • La moyenne d’âge des patientes était de 31,1 ans, l’âge moyen de survenue du cancer était de 38,9 ans.

    Chez les patientes traitées pour infertilité, les auteurs ont inclu et distingué les traitements par FHS (urinaires et recombinantes), le nombre de FIV, l’administration d’analogues de la Lh-Rh, de citrate de clomiphene, de progestatifs.

    L’étude retrouve la survenue de 522 cancers du sein, 41 cancers de l’endomètre, 45 cancers de l’ovaire, 311 cancers in situ du col utérin,

    32 lésions invasives du col utérin.
     

  • En termes de cancer du sein, les auteurs ne retrouvent pas d’augmentation du risque de survenue chez les patientes traitées pour infertilité, par rapport à celles n’ayant pas eu de traitement.

    On note une diminution du risque chez les femmes ayant eu un traitement par progestatifs.
     

  • Aucun traitement d’infertilité n’a été associé avec une augmentation de survenue de cancers de l’endomètre.
     
  • Aucune corrélation n’a été retrouvée en termes de cancers in situ ou de lésions invasives du col utérin.
     
  • Les résultats sur le risque de survenue de cancers de l’ovaire sont d’une interprétation plus délicate pour plusieurs raisons :
    • Il n’a pas été possible d’analyser le risque de tumeur border-line de l’ovaire, non répertorié dans l’ICR (Israeli Cancer Registration) ;
       
    • L’exposition a tout type de traitement d’infertilité n’est pas corrélée à une augmentation de risques de cancer de l’ovaire (HR 0,90. 95 % CI), de même que les traitements associant analogues de la Lh-Rh, citrate de clomiphene, progestagene ;
       
    • en comparaison avec les patientes non traitées pour infertilité, les femmes traitées par FIV ont un risque de survenue de lésion ovarienne plus élevé (HR 1,58. 95 % CI), et ce risque est plus important chez les femmes ayant eu 4 FIV  ou plus (HR 1,78) avec une signification statistique faible ;

       

    • les auteurs ont également analysé les résultats dans les sous-groupes de patientes nullipares ou multipares : bien que les cohortes soient faibles, le risque de cancers de l’endomètre et de cancers de l’ovaire, associés à un traitement de FIV, est plus élevé chez les patientes de parité 1 ou multipares que chez les nullipares, peut-être du fait du plus grand nombre de traitements réalisés chez les patientes multipares
      (33 % des femmes enceintes ont eu au moins 4 cycles de FIV par rapport à 18,5 % des patientes nullipares).
      Ces résultats ne sont pas concordants avec d’autres études qui avaient montré une augmentation du risque de cancers de l’ovaire chez les patientes traitées par inducteurs d’ovulation sans grossesse évolutive.
       
    • aucun lien n’a été trouvé entre la cause de l’infertilité et la survenue de risques de lésions malignes.

Les auteurs reconnaissent les « limites » de leur étude :

  • suivi relativement bref compte tenu de l’âge habituel de survenue des lésions cancéreuses, notamment de l’ovaire et de l’endomètre.
  • les auteurs ne disposent pas de toutes les informations concernant les facteurs de risques associés, tels que : index de masse corporelle, prise préalable d’une contraception orale, antécédents familiaux de cancers…
     

En conclusion :

  • Cette étude reste relativement rassurante quant aux risques de cancers chez les patientes traitées pour infertilité.
  • Les auteurs ne retrouvent pas de lien entre les traitements d’induction d’ovulation et la survenue de cancers du sein et de l’endomètre.
  • Sans qu’il y ait de signification statistique notable, il existe néanmoins une augmentation de risques de lésions ovariennes en cas de multiplication de cycles de FIV.

 

In vitro fertilization and risk of breast and gynecologic cancers : a rétrospective cohort study within the Israeli Maccabi Healthcare Services – Louise A. BRINTON, Eitan LUNENFELD et Coll. – Fertility et Sterility Vol. 99 n°5 April 2013 pp1189-1196.

 
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