Obésité : un facteur de risque majeur de mort fœtale in utéro !

La prévalence de l’obésité dans les pays occidentaux augmente de façon vertigineuse ces  dernières décennies en particulier pour les obésités sévères (IMC> 35 kg/m2) et morbides (IMC> 40kg/m2). En quelques années, la proportion de l’obésité morbide est passée de 2,2% à 3,1%  et celle de l’obésité sévère de 19,8 à 27,2% de la population des Etats-Unis. Chez la femme enceinte, elle est associée à de nombreuses complications tels le diabète gestationnel, l’hypertension gravidique, les accidents thromboemboliques veineux et la pré-éclampsie. Le travail spontané est souvent retardé chez ces patientes avec un recours fréquent à une induction du travail aboutissant à plus fort pourcentage d’accouchements par césarienne.

L’obésité maternelle représente également un facteur de risque de mort fœtale in utéro (MFIU) avec un taux multiplié par 2 ou 3 comparativement aux non-obèses. Il apparait une association linéaire entre l’indice de masse corporelle (IMC) et le taux de MFIU : ainsi les femmes dont l’IMC dépasse 40kg/m2 ont un risque 1 fois et demi supérieur à celle dont l’IMC se situe entre 30 et 35 kg/m2. En cas d’obésité, le risque de MFIU semble également dépendant de l’âge gestationnel, ce qui peut avoir des implications importantes en termes de prise en charge.

Une équipe américaine a conduit une étude de cohorte rétrospective visant à analyser les relations entre obésité et MFIU sur plus de 2,8 millions de naissances. Les femmes ont été divisées en plusieurs catégories selon leur IMC : 51,4% avait un poids normal (IMC de 18,5 à 24,9 kg/m2), 26% un surpoids (IMC de 25,0 à 29,9 kg/m2), 13,1% une obésité classe I (IMC de 30,0 à 34,9 kg/m2), 5,8% une obésité classe II ( IMC de 35,0 à 39,9 kg/m2), 3,4% une obésité classe III ( IMC de 40,0 à 49,9 kg/m2) et 0,4% présentaient un IMC supérieur à 50.  Les auteurs ont aussi déterminé 4 périodes de la grossesse : 30-33 semaines de grossesse (SG), 34-36 SG, 37-39 SG et 40-42 SG. Ils ont ensuite calculé le risque de MFIU en fonction de la catégorie d’IMC pour chaque période de l’âge gestationnel et cela après ajustement sur les autres facteurs de risque connus de MFIU : âge maternel, primiparité, niveau social, ethnie, tabagisme, hypertension artérielle chronique ou diabète préexistant.

Dans cette cohorte, le taux global de MFIU était de 3,1 pour 1000 naissances. Comparativement aux femmes de poids normal, le HR pour le risque de MFIU était de 1,36 pour les femmes en surpoids, de 1,71 pour les femmes en obésité classe I, de 2,0 pour celles en obésité classe II, de 2,48 en cas d’obésité classe III et de 3,16 si l’IMC dépassait 50 kg/m2.

Cette augmentation linéaire du risque apparaissait dans chaque période de l’âge gestationnel. Pour les obésités morbides avec un IMC>50 kg/m2, le risque se majorait de façon plus abrupte encore dans la dernière période de la grossesse : risque multiplié par 5,7 à 39 SG et par 13,6 à 41 SG comparativement aux femmes de poids normal.

Les mécanismes physiopathologiques à l’origine de la relation entre poids maternel et risque de mort fœtale in utéro sont multiples et variés. Les pourcentages de désordres hypertensifs et de diabètes gestationnels sont bien sur augmentés chez ces femmes. Certains auteurs ont évoqué le rôle de possibles évènements hypoxiques par phénomènes d’apnées maternelles. L’insuffisance utéro-placentaire précoce pourrait également participer au phénomène expliquant le risque majoré dans la dernière période de la grossesse.

Se pose la question de la surveillance de fin de grossesse de ces femmes : doit-elle être intervenir plus tôt, doit-elle être accrue, quels en sont les meilleurs moyens et cela peut-il déboucher sur des mesures d’induction prématurée du travail ? Ces interrogations ne sont pas clairement résolues et l’avenir nous permettra peut-être d’y répondre. En attendant, des mesures préventives avec prise en charge des patientes en surpoids et obèses en préconceptionnel et information rigoureuse des risques restent de mise plus que jamais aussi bien au niveau des soignants que des femmes elles-mêmes.

 

Yao R, Ananth CV, Park BY, et al. Obesity and the risk of stillbirth: a population-based cohort study. Am J Obstet Gynecol 2014;210:457.e1-9.

 
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