Le traitement hormonal de la ménopause à la française est le moins à risque de cancer du sein : une simple mais importante confirmation !

Le traitement hormonal de la ménopause (THM) est prescrit à l’heure actuelle principalement pour soulager les femmes du syndrome climatérique. Ses bénéfices en termes d’amélioration de la qualité de vie et de prévention de l’ostéoporose ne sont plus à démontrer. Les risques, notamment celui de développer un cancer du sein, en a réduit dramatiquement les prescriptions. En effet,  depuis plus de 17 ans, diverses publications ont précisé l’implication du THM dans le développement de certains cancers. Ainsi, les recommandations actuelles, dans la majorité des pays, en limitent la prescription  aux femmes qui ont besoin d’être soulagées en utilisant les plus faibles posologies efficaces pour une durée maximale de 5 ans.

A partir des données des deux très grands registres de médecins généralistes anglais,  une nouvelle étude de cohortes analyse le risque de cancer du sein en association avec différents types de THM sur les 20 dernières années. Ainsi, entre janvier 1998 et décembre 2018, les 98 611 cas de cancer du sein diagnostiqués chez des femmes âgées de 50 à 79 ans ont été appariés à 457 498 contrôles. Les données concernant l’utilisation de THM provenaient des registres de prescriptions jusqu’à un an avant la date de découverte du cancer.

Comparativement aux femmes contrôles, les « cas » étaient plus volontiers en surpoids ou obèses (53% versus 50%), plus souvent fumeuses (29% versus 27%), avaient plus souvent un antécédent de pathologie bénigne du sein (9% versus 7%) ou une histoire familiale de cancer du sein (4% versus 2,5%).

34% des cas et 31% des contrôles avaient été exposés à un THM au moins un an avant le diagnostic de cancer. 26% des cas et 30% des contrôles n’avaient utilisé qu’un estrogène seul alors que 74% des cas et 70% des contrôles avaient utilisé un THM combiné (association d’un estrogène et d’une molécule progestative).

L’utilisation d’un THM était associée à une légère augmentation globale du risque de cancer du sein (Odds Ratio ajusté 1.21, IC à 95% 1.19- 1.23), comparativement aux femmes n’ayant jamais utilisé de THM. L’augmentation du risque semblait supérieur pour les femmes utilisant un traitement combiné (OR ajusté 1.26, IC à 95% 1.24- 1.29) et moins important en cas d’estrogénothérapie seule (OR ajusté 1.06, IC à 95% 1.03- 1.10). Le risque augmentait avec la durée d’utilisation. Comparativement aux femmes n’ayant jamais utilisé de THM, les femmes traitées par estrogènes seuls ou en association avec une molécule progestative moins de 5 ans avaient une élévation du risque de cancer du sein avec un odds ratio 1.15 (IC 95 % = 1.09 à 1.21) et de 1.79 (1.73 à 1.85) pour les utilisatrices de plus de 5 ans. Cette association durée-dépendante était cependant moins forte pour une estrogénothérapie seule, la tibolone ou l’association d’estradiol et de dydrogestérone. Quelle que soit la durée d’utilisation, l’association d’estradiol et de dydrogestérone était associée au plus faible risque alors que les autres progestatifs évalués en association avec un estrogène étaient similaires entre eux (norethistérone, levonorgestrel ou médroxyprogestérone). Aucune différence n’apparaissait en fonction de la dose d’estrogènes (fortes doses ou faibles doses) ou son mode d’administration.

Après arrêt du traitement, l’augmentation du risque de cancer du sein semblait disparaitre 2 ans après l’interruption pour tous les traitements sauf pour l’association de l’estrogène avec la médroxyprogestérone où le risque persistait, à un moindre degré, jusqu’à 5 ans et pour le levonorgestrel après 10 ans.

Il semblerait exister une association inverse avec l’IMC : les femmes dont l’IMC était le plus bas avait le plus fort risque de cancer du sein après 5 ans de THM par estrogènes seuls (OR ajusté 1.24, IC à 95% 1.11- 1.35) ou estrogènes plus progestatifs (OR ajusté 1.93, IC à 95% 1.80- 2.03) comparativement aux contrôles n’ayant jamais utilisé de THM.

D’autres facteurs connus comme protecteurs ou non vis-à-vis du risque de cancer du sein n’ont, malheureusement, pas été évalué dans cette étude (activité physique, parité, âge de la ménarche, densité mammaire…).

A noter que, dans cette étude, l’utilisation d’estrogènes locaux (crèmes ou ovules) n’augmentait pas le risque de cancer du sein.

Cette étude semble confirmer que le THM tel que nous le prescrivons habituellement (association d’estradiol et de dydrogestérone, équivalent de la progestérone naturelle) semble le moins à risque de cancer du sein. Après l’arrêt du THM, c’est encore cette même association qui voit ce risque diminuer le plus rapidement.

Continuons donc à proposer un THM « à la française » à toutes les femmes qui en ont besoin, après vérification de l’absence de contre-indications. Ne négligeons donc sous aucun prétexte la qualité de vie des femmes tout en leurs assurant une vigilance accrue. La durée du THM est, quant à elle, guidée, lors de la surveillance, par la diminution des besoins. Un arrêt le plus progressif possible permet souvent une interruption thérapeutique idéalement dans les 5 ans.

Vinogradova Y, Coupland C, Hippisley-Cox J. Use of hormonal replacement therapy and risk of breast cancer : nested case-control studies using the DResearch and CPRD databases. BMJ 2020, Oct 28 ; 371:m3873. doi: 10.1136/bmj.3873. PMID : 3115755; PMCID : PMC7592147.

 
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