Tolérance de la vaccination hpv : les données françaises

Marine Saïdani, Vincent Lavoué, Jean Levêque
Département d'Obstétrique, Gynécologie et Reproduction Humaine
CHU Anne de Bretagne – Rennes, Breizh
Correspondance : Jean Levêque, Service de Gynécologie CHU Anne de Bretagne, 16 Blvd de Bulgarie BP 90 347 F-35 203 Rennes Cedex 2


Les deux vaccins HPV disponibles en France (bi- et quadri-valents) ont une efficacité scientifiquement prouvée, démontrée lors des essais randomisés de phase III, et leur efficacité en population commence à être observée [1] :

  • diminution de la prévalence des infections HPV 16 & 18 de 64% chez les filles vaccinées,
  • protection croisée contre les infections prévalentes non 16 non 18 (HPV 31, 33 45) de 28%,
  • sans remplacement de souche,
  • diminution des lésions de CIN de Haut Grade (CIN3) de 31%,
  • diminution des verrues génitales chez les filles vaccinées par le vaccin quadrivalent, mais aussi chez les garçons non vaccinés.

Marine Saïdani, Vincent Lavoué, Jean Levêque
Département d'Obstétrique, Gynécologie et Reproduction Humaine
CHU Anne de Bretagne – Rennes, Breizh
Correspondance : Jean Levêque, Service de Gynécologie CHU Anne de Bretagne, 16 Blvd de Bulgarie BP 90 347 F-35 203 Rennes Cedex 2
Marine Saïdani, Vincent Lavoué, Jean Levêque
Département d'Obstétrique, Gynécologie et Reproduction Humaine
CHU Anne de Bretagne – Rennes, Breizh
Correspondance : Jean Levêque, Service de Gynécologie CHU Anne de Bretagne, 16 Blvd de Bulgarie BP 90 347 F-35 203 Rennes Cedex 2


Tous ces bénéfices sont d'autant plus importants que la couverture vaccinale est élevée dans les populations considérées : c'est l'effet protecteur de l'immunité de troupeau.

Or en France, les résultats des campagnes de vaccination HPV en France sont décevants : après des débuts prometteurs la vaccination s'est effondrée avec une couverture vaccinale de la population cible aux alentours de 12%. Plusieurs raisons peuvent être évoquées :

  • le coût des vaccins, mais le remboursement existe, et de nombreuses initiatives locales soutenues par les pouvoirs publics permettent l'accès au vaccin à la grande majorité des jeunes filles,
  • les freins culturels liés à l'association de ce vaccin à la sexualité, mais l'abaissement de l'âge de la vaccination à 11 ans en 2014 n'a pas enrayé la chute des vaccinations,
  • le désir de beaucoup d'un retour "rousseauiste" à la Nature, mais la Nature regorge d'HPV,
  • la possibilité de la prévention secondaire des cancers du col par le dépistage (nonobstant l'impact obstétrical des conisations), mais en France 30% des femmes ne se font pas dépister, et aucune politique publique de dépistage du cancer du col utérin n'a jamais abouti sur l'ensemble du territoire français,
  • enfin et surtout,  la crainte des effets secondaires de ces vaccins, préoccupation légitime de tout parent.

Deux publications récentes apportent un éclairage sur la tolérance du vaccin, l'une en population, l'autre portant chez un nombre important de jeunes filles françaises.

L'étude scandinave [2] s'est intéressée à 3,983,824 jeunes filles et femmes danoises et suédoises âgées de 10 à 44 ans en comparant les nombre de cas pathologies démyélinisantes chez les vaccinées et les non vaccinées :

  • 4,322 cas de sclérose en plaques (SEP) ont été relevés : 3,983 chez les 3,189,285 non vaccinées et 339 cas chez les 788,986 vaccinées, avec un donc un Risque Relatif de SEP = 0.90 [95%IC = 0.70-1.15],
  • 2,930 cas de maladies démyélinisantes chez les 3,191,785 non vaccinées et 370 cas chez les vaccinées, avec un Risque Relatif = 1.00 [95%IC : 0.80-1.26].

Les auteurs concluent dans cette étude en population à l'absence de relation causale entre maladies démyélinisantes et vaccination HPV.

L'Agence Nationale de Sécurité du Médicament a rendu en septembre 2015, son rapport final de l'étude portant sur les vaccins anti-HPV et le risque de maladie auto-immune (MAI).

Cette étude longitudinale portant sur 2,256,716 jeunes filles de 13 à 16 ans (âge moyen de 13.5 ans, dont 37.4% étaient vaccinées à 93% par le vaccin quadrivalent, avec un suivi moyen de 25.3 mois), suivies de 2008 à 2012 à partir des dossiers du Système national d'information inter-régimes de l'Assurance Maladie, a analysé l'incidence de 14 MAI selon le statut vaccinal. Sur l'ensemble des 14 MAI analysées, il n'a pas été noté d'élévation de risque chez les vaccinées, mais deux MAI semblent associées à la vaccination HPV : les Maladies Inflammatoires Chroniques de l'Intestin et le syndrome de Guillain Barré (Tableau 1).

Tableau 1. Les principaux résultats de l'étude SNIIRAM sur la tolérance des vaccins HPV.

 

Vaccinées

n = 842,120 (37.4%)

Non vaccinées

n = 1,410,596 (62.6%)

14 MAI

996

2987

HR = 1.07 [0.99 – 1.16] è Absence d’effet

Maladies Inflammatoires Chroniques de l'Intestin

293

647

HR = 1.19 [1.02-1.39] è Association faible

Syndrome de Guillain-Barré

21

19

HR = 4.00 [1.84-8.69] è 1 à 2 cas supplémentaires / 100,000 vaccinées

 

L'analyse de ces données a été faite par le comité d'experts indépendants réunis par l'ANSM :

  • le risque de MICI ne paraît pas cliniquement "relevant" et peut être du au hasard statistique, à des facteurs confondants ou un "effet cigogne" qui confond corrélation et causalité (beaucoup de fractures lors de la pratique du vélo, plus de fractures lors des cancers, donc le vélo provoque le cancer…),
  • le risque de syndrome de Guillain Barré (1.1 / 100,000 personnes année) est lui plus affirmé et avait été noté dans un première étude américaine basée sur les déclarations passives d'effets indésirables post-vaccinaux entre 2006-209 [3] (Vaccine Adverse Event Reporting System), tandis que l'analyse par le même organisme des années 2010-2012 n'avait pas retrouvé de risque augmenté de Guillain-Barré chez les sujets vaccinés [4] ; il figure de plus sur les caractéristiques produit du vaccin quadrivalent.

Les experts estiment toutefois que le rapport risques / bénéfices de la vaccination HPV n'est pas remis en cause par ce risque de syndrome de Guillain Barré en raison de sa relative rareté et de sa guérison sans séquelle chez l'adolescent dans plus de 90% des cas.

Reférences

[1] Drolet M, Benard E, Boily MC, Ali H, Baandrup L, Bauer H, et al. Population-level impact and herd effects following human papillomavirus vaccination programmes: a systematic review and meta-analysis. The Lancet. Infectious diseases. 2015;15:565-80.

[2] Scheller NM, Svanstrom H, Pasternak B, Arnheim-Dahlstrom L, Sundstrom K, Fink K, et al. Quadrivalent HPV vaccination and risk of multiple sclerosis and other demyelinating diseases of the central nervous system. Jama. 2015;313:54-61.

[3] Souayah N, Michas-Martin PA, Nasar A, Krivitskaya N, Yacoub HA, Khan H, et al. Guillain-Barre syndrome after Gardasil vaccination: data from Vaccine Adverse Event Reporting System 2006-2009. Vaccine. 2011;29:886-9.

[4] Ojha RP, Jackson BE, Tota JE, Offutt-Powell TN, Singh KP, Bae S. Guillain-Barre syndrome following quadrivalent human papillomavirus vaccination among vaccine-eligible individuals in the United States. Human vaccines & immunotherapeutics. 2014;10:232-7.

 
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