ZIKA et Assistance Médicale à la Procréation

Recommandations professionnelles pour la prise en charge en AMP, en préservation de la fertilité et en don de gamètes dans les départements français d’Amérique et en métropole dans le contexte de l’épidémie à virus Zika

Un groupe d’experts1 a été constitué par l’Agence de la biomédecine pour élaborer ces recommandations et se réunira régulièrement pour analyser l’évolution de l’épidémie et ses conséquences dans le domaine de l’AMP, de la préservation de la fertilité et du don de gamètes.
 

Étant donné le peu de données actuellement disponibles concernant les modes de transmission de l’infection par le virus Zika, ces recommandations sont susceptibles d’évoluer. Ces recommandations concernent :

  • les couples souhaitant une AMP,
  • les patients souhaitant bénéficier d’une préservation de la fertilité,
  • les personnes souhaitant donner des gamètes dans les DFA ou en métropole.

Dans les départements français d’Amérique (DFA)

Couples souhaitant une AMP dans les DFA (ou couples résidant dans les DFA et souhaitant réaliser une AMP en métropole)

La règle de base est le report systématique de la tentative d’AMP, qu’il s’agisse d’une insémination artificielle, de fécondation in vitro ou de transfert d’embryons congelés , dans l’attente de nouvelles données scientifiques.

Toutefois, dans certaines situations où le report de la tentative serait susceptible d’entraîner une véritable perte de chance pour le couple, en raison de l’âge de la femme ou de son statut ovarien2, seule la cryoconservation des ovocytes peut être envisagée. En l’absence de données disponibles sur les risques encourus, ces situations doivent rester exceptionnelles et devront être motivées. Dans ces situations :

  • Des tests à la recherche de l’infection par le virus Zika sont effectués par RT-PCR3 sur le sang et les urines de la patiente :
    •  En  cas  de  positivité d’un  des  tests, la  cryoconservation des  ovocytes n’est pas envisageable. Les  tests  pourront être  renouvelés jusqu’à  leur  négativation  avant denvisager la démarche ;
    • En cas de négativité des deux tests, la démarche est envisageable sous réserve de la répétition des tests et de résultats négatifs en début de stimulation.
  • La décision est validée au cas par cas au sein de l’équipe pluridisciplinaire qui a évalué la perte de chance pour le couple concerné ; les éléments médicaux de justification sont inscrits dans le dossier du couple.
  • Une information est délivrée sur l’état actuel des connaissances sur le risque infectieux, par oral et à l’aide de la note d’information proposée par l’Agence de la biomédecine.
  • Dans cette situation, la stimulation ovarienne, le prélèvement, la vitrification et la conservation des ovocytes impliquent le consentement éclairé de la patiente concernée.
  • Les actes sont réalisés dans un circuit d’AMP en contexte viral4.
  • Des échantillons de liquides folliculaires sont conservés congelés.

 

Patients souhaitant bénéficier d’une préservation de la fertilité dans les DFA

Dans ces situations où le report est susceptible d’entraîner une vraie perte de chance pour le patient, il est envisageable, après information spécifique et recueil du consentement, de cryoconserver les gamètes ou les tissus germinaux.

  • La conduite à tenir est discutée au cas par cas au sein de l’équipe médicale pluridisciplinaire qui évalue la perte de chance si une préservation de la fertilité n’est pas faite, tenant compte de la situation médicale du patient concerné (en considérant par exemple, la possibilité de différer le traitement contre le cancer ou le risque de toxicité sur la fertilité du traitement, et également les résultats des RT-PCR…).
  • Des tests à la recherche d’une infection par le virus Zika sont effectués par RT-PCR sur le sang et les urines des patients :
    • Chez  l’homme, des  tests  complémentaires devront  être  effectués sur  le  plasma séminal avant préparation du sperme et sur la fraction finale des spermatozoïdes après préparation (gradient et lavages) :
      • Si le test sur la fraction finale est positif, les paillettes ne pourront pas être utilisées en AMP ;
      • Si le test sur la fraction finale est négatif, la préservation est poursuivie ; toutefois la réutilisation des paillettes devra être discutée en fonction des résultats des autres tests et de l’avancée des connaissances.
    • Chez la femme, en cas de positivité d’un des tests, la préservation de la fertilité sera discutée au cas par cas en tenant compte notamment de la possibilité de différer la préservation de la fertilité dans l’attente de la négativation de ces tests. Lorsque le prélèvement ovocytaire est effectué, un test complémentaire sera effectué par RT-PCR dans le liquide folliculaire. En cas de positivité de ce dernier, en l’état actuel des connaissances, la réutilisation des ovocytes ne pourra pas être envisagée.
    • Chez l’enfant, la conservation du tissu germinal est envisageable quels que soient les résultats des tests par RT-PCR sur le sang et les urines. La réutilisation des tissus ne pourra être envisagée qu’au vu des nouvelles connaissances acquises.
  • Une information est délivrée sur cette démarche et le patient (ou son représentant) consent à la  conservation, le cas échéant, des gamètes ou des tissus germinaux.
  • Les actes sont réalisés dans un circuit d’AMP en contexte viral.

Personnes souhaitant donner des gamètes dans les DFA

L’activité de don de gamètes est arrêtée pour une durée qui dépendra de l’acquisition de nouvelles connaissances.


En métropole

Couples résidant en métropole souhaitant être pris en charge en AMP après un séjour de l’un ou l’autre dans les zones d’épidémie5

La règle de base qui s’applique est de reporter la prise en charge au-delà de 28 jours après le retour de la zone d’épidémie.

Au-delà des 28 jours et pendant une période 6 mois6,

  • Des tests RT-PCR7  sont réalisés dans le sang et les urines chez les deux membres du couple:
    • Si l’un ou l’autre de ces tests est positif, l’AMP est reportée dans l’attente de leur négativation.
  • De plus, chez l’homme, un test par RT-PCR est systématiquement effectué dans le plasma séminal avant préparation et dans la fraction finale après préparation du sperme (gradient et lavages) :
    • Si le test sur la fraction finale est positif, les paillettes constituées ne pourront  pas être utilisées en AMP ;
    • Si le test sur la fraction finale est négatif alors que le test est positif dans le plasma séminal, l’AMP est envisageable avec ces paillettes en respectant le circuit de l’AMP en contexte viral.
  • La préparation du sperme destinée à conserver des paillettes pour l’AMP ultérieure est réalisée dans un circuit d’AMP en contexte viral.
  • Une information est délivrée sur l’état actuel des connaissances.
  • Dans cette situation, la réalisation de l’AMP  implique le consentement éclairé des deux membres du couple.

Personnes   résidant   en   métropole   souhaitant   être   pris   en   charge   en préservation de la fertilité  après un séjour dans les zones d’épidémie8

La règle de base qui s’applique est de reporter la prise en charge au-delà de 28 jours après le retour de la zone d’épidémie.

Au-delà des 28 jours et pendant une période 6 mois,

  • Des tests RT-PCR sont réalisés dans le sang et les urines chez les patients concernés:
    • Si l’un ou l’autre de ces tests est positif, la préservation de la fertilité est reportée dans l’attente de leur négativation.
  • De plus, chez l’homme, en vue de conserver des paillettes de spermatozoïdes, un test par
  • RT-PCR est systématiquement effectué :
    • dans le plasma séminal avant préparation et dans la fraction finale après préparation du sperme (gradient et lavages)
      • Si le test sur la fraction finale est positif, les paillettes constituées ne pourront pas être utilisées en AMP ;
      • Si le test sur la fraction finale est négatif alors que le test est positif dans le plasma séminal, l’AMP sera envisageable avec ces paillettes en respectant le circuit de l’AMP en contexte viral.
  • La préparation du sperme destinée à conserver des paillettes pour une AMP ultérieure est réalisée dans un circuit d’AMP en contexte viral.
  • Une information est délivrée sur l’état actuel des connaissances.
  • Dans cette situation, la réalisation de la préservation de la fertilité implique le consentement éclairé de la personne.

Toutefois, dans les situations où le report est susceptible d’entraîner une vraie perte de chance pour le patient, il est envisageable, dans la période des 28 jours, après information spécifique et recueil du consentement, de cryoconserver les gamètes ou les tissus germinaux.

La décision est validée au cas par cas au sein de l’équipe médicale pluridisciplinaire qui a évalué la perte de chance si une préservation de la fertilité n’était pas faite, tenant compte de la situation médicale du patient concerné (en considérant par exemple, la possibilité de différer le traitement contre le cancer ou le risque de toxicité sur la fertilité du traitement, et également les résultats des RT- PCR…).

  • Des tests à la recherche d’une infection par le virus Zika sont effectués par RT-PCR sur le sang et les urines des patients :
    • Chez  l’homme, des  tests  complémentaires devront  être  effectués sur  le  plasma séminal avant préparation du sperme et sur la fraction finale des spermatozoïdes après préparation (gradient et lavages) :
      • Si le test sur la fraction finale est positif, les paillettes constituées ne pourront pas être utilisées en AMP ;
      • Si le test sur la fraction finale est négatif alors que le test est positif dans le plasma  séminal,  les  paillettes  pourront  être  réutilisées après  discussion prenant en compte l’avancée des connaissances.
    • Chez la femme, en cas de positivité d’un des tests, la préservation de la fertilité sera discutée  au  cas  par  cas  dépendant  notamment  de  la  possibilité  de  différer  la préservation de  la  fertilité  dans  l’attente  de  la  négativation  de  ces  tests ;  si  le prélèvement d’ovocytes est effectué, un test complémentaire sera effectué par RT- PCR dans le liquide folliculaire. En cas de positivité la réutilisation des ovocytes ne pourra pas être envisagée en l’état actuel des connaissances.
    • Chez l’enfant, la conservation du tissu germinal est envisageable quels que soient les résultats des tests par RT-PCR sur le sang et les urines. La réutilisation des tissus ne pourra être envisagée qu’au vu des nouvelles connaissances acquises.
  • Une information est délivrée sur cette démarche et le patient (ou son représentant) consent à la conservation le cas échéant des gamètes ou des tissus germinaux.
  • Les actes sont réalisés dans un circuit d’AMP en contexte viral.

Personnes souhaitant donner des gamètes en métropole après un séjour dans les zones d’épidémie

Ces candidats au don sont récusés pour une durée qui dépendra de l’acquisition de nouvelles connaissances.

Composition du groupe

 

EXPERTS

Agence de la biomédecine

Pr Louis BUJAN
Médecin de la reproduction
Hôpital Paule de Viguier
Toulouse

Dr Sylvie EPELBOIN
Gynécologue-Obstétricien
GH Bichat-Claude Bernard
Paris

Pr Jean-François GUÉRIN 
Médecin de la reproduction 
HCL Hôpital FME
Bron

Dr Guillaume JOGUET
Médecin de la reproduction
CHU Abymes
Pointe à Pitre

Dr Olivier PICONE
Gynécologue-Obstétricien
Hôpital Foch
Suresnes

Pr Christophe PASQUIER
Virologiste 
Institut Fédératif de Biologie
Toulouse

Dr Marie-Claire PATY 
Département des maladies infectieuses
Institut de Veille Sanitaire

 

Dr Jacques-Olivier GALDBART
En charge de la vigilance
au Pôle Sécurité Qualité

Dr Karim LAOUABDIA
Directeur général adjoint
médical et scientifique

Dr Sophie LUCASSAMUEL
Responsable du Pôle Sécurité Qualité

Dr Françoise MERLET
Référent en AMP

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

​1 La composition du groupe est disponible à la fin du document
Les critères permettant d’évaluer la perte de chance du fait du report de la tentative d’AMP d’une durée inconnue aujourd’hui (dans l’attente de nouvelles données scientifiques) sont à discuter au sein de l’équipe pluridisciplinaire du centre d’AMP. Les situations « dérogatoires » à la règle de base doivent rester exceptionnelles.
Les tests par RT-PCR Zika dans les différents fluides biologiques doivent avoir fait l’objet d’une validation
Tel que décrit dans l’arrêté du 3 aout 2010 relatif aux règles de bonnes pratiques cliniques et biologiques en AMP
La liste à jour des zones d’épidémie est disponible sur le site web de l’ECDC http://ecdc.europa.eu/en/Pages/home.aspx
Par précaution en l’absence de données sur la durée de la persistance du virus dans le sperme
Le diagnostic sérologique n’est pas ici proposé ; en effet, incluant le test de séro-neutralisation qui permet de distinguer les différentes arboviroses, il n’est actuellement disponible qu’au niveau du centre national de référence et réservé aux femmes enceintes
8 Pour la préservation féminine de la fertilité ou le don d’ovocytes, en l’état actuel des connaissances, il n’est pas possible d’exclure le risque de transmission par voie sexuelle par son conjoint si celui-ci a séjourné dans une zone d’épidémie ; en conséquence, la notion d’un séjour à risque est recherchée chez les deux membres du couple le cas échéant.

Diffusion avec l'accord de Véronique LE BRIS
Direction PEGh (Procréation, Embryologie et Génétique humaines)
Agence de la Biomédecine

 
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