Hormone anti-müllerienne (AMH) et infertilité

L’hormone anti-müllerienne est un des critères majeurs d’évaluation de la « réserve ovarienne », c'est-à-dire de la capacité d’ovulation spontanée ou de la réponse folliculaire ovarienne à un traitement d’induction d’ovulation, soit dans le cadre d’une insémination avec sperme de conjoint (IAC), ou d’une fécondation in vitro (FIV).

Mais d’autres facteurs doivent être pris en considération :

  • compte des follicules pré-antraux,
  • âge de la patiente,
  • variabilité des dosages d’AMH selon les kits utilisés en laboratoire.

Tous ces éléments doivent être soigneusement étudiés, afin de ne pas prendre des décisions trop hâtives et d’éviter d’orienter trop tôt les couples vers le don d’ovocytes.

  1. AMH et prédiction des résultats en FIV
  2. Taux d'AMH dans les traitements d'insémination intra-utérine
  3. Impact de l’AMH sur les taux de naissance
     

1 - AMH et prédiction des résultats en fécondation in vitro

La communication de C. TIBI, C. PESSAH et coll. (poster n°69 FFER septembre 2014) a porté sur la prédiction des résultats en FIV de survenue de grossesse en fonction de l’âge et du taux d’AMH.
 

Introduction

Le dosage de l’AMH plasmatique est habituellement utilisé pour prévoir la réponse ovarienne à la stimulation (1) (2). Il permet d’adapter la dose de départ de gonadotrophines (3) et d’orienter le choix du protocole en FIV (4). Mais son caractère prédictif (5) de la survenue d’une grossesse est discuté ainsi que son utilisation pour l’inclusion (ou l’exclusion) des patientes en FIV. La notion d’un seuil d'AMH est également remise en cause. Doit-on l’utiliser comme critère d’exclusion des patientes ?
 

Matériel et méthodes

Etude rétrospective sur 5 ans (2009-2013) de 4225 cycles avec ponction chez des patientes dont l’AMH était documentée dans le dossier et dont l’issue de grossesse était connue. Les seuils de 0,5 ng/mL et de 1 ng/mL ont été choisis.
 

Résultats

Taux de grossesse en fonction de l’âge et du seuil d’AMH de 0,5ng/mL et de 1ng/mL

  1. Ces 2 seuils d’AMH ne sont pas discriminants ni pour prévoir l’issue de la tentative quelque soit le seuil envisagé ni comme critère d’exclusion.
  2. Les taux de grossesse sont meilleurs pour des AMH > 0,5 vs <0,5 ng/mL à partir de 35 ans. Cela reste vrai quand on prend le seuil de 1 ng/mL. Mais aucune différence n’est notée avant 35 ans Aucune grossesse avec accouchement n’a été observée à 43 ou 44 ans pour des AMH≤ 0,5 ng/mL, alors qu’on note environ 5% d’accouchements dans cette classe d’âge si l l’AMH est > 0,5ng/mL. En cas de grossesse et à tout âge, le niveau d’AMH ne parait pas prédictif de son évolutivité.
  3. Les techniques et les kits de dosage de l’AMH ont évolué dans le temps ce qui rend difficile l’interprétation des dosages.

Conclusion

  1. Pour les patientes jusqu'à 42 ans, on ne peut pas prédire le résultat de la FIV à partir du taux d’AMH même si l’on note une tendance à des meilleurs résultats pour des AMH plus élevées.
  2. Le taux d AMH devrait permettre d’exclure les patientes de 43 et 44 ans s’il est inférieur à 0,5ng/mL.
     

(1) Broekmans, Human Reprod 2006 (12), 6:685-718. A systematic review of tests predicting ovarian reserve and IVF outcome

(2). Jayaprakasan, Fertility & Sterility 2010. 93(3):855- 86 A prospective, comparative analysis of anti-Müllerian hormone, inhibin-B, and three-dimensional ultrasound determinants of ovarian reserve in the prediction of poor response to controlled ovarian stimulation

(3) La Marca, Sunkara Hum Reprod.2014; 20:124–40. Individualization of controlled ovarian stimulation in IVF using ovarian reserve markers: from theory to practice.

(4) Reichman. Fertility & Sterility .2014,vol 101.Value of antimullerian hormone as a prognostic indicator of in vitro fertilization outcome

(5) Broer, Mol , Hendriks .Fertility & Sterility 2009 Mar; 91(3):705-14. The role of antimullerian hormone in prediction of outcome after IVF: comparison with the antral follicle count.

AMH et prédiction des résultats en FIV  - Dr Charles TIBI Dr Carine PESSAH, Dr Edouard AMAR, Dr Charles BRAMI, Dr Pascal BRIOT, Dr Jean Marc EMMANUELLI, Dr André GAUTHIER,  Dr Gérard HELUIN, Dr François ROLET, Dr Eric SEDBON, Dr Alain THEBAULT, Dr Jean THOREL (Centre d’AMP de l’hôpital Américain)
 


 

2 - Un taux effondré d’hormone anti-müllerienne ne semble pas péjoratif pour la prise en charge en insémination intra-utérine (IIU)

H. DRAPIER et coll. (CHU de RENNES) ont rapporté les résultats de grossesses dans les traitements d’insémination intra-utérine chez des patientes ayant un taux d’AMH inférieur à 1 ng/ml.

Leur étude prospective a porté sur 3441 cycles d’IIU réalisés entre 2008 et 2013.

855 patientes avec une moyenne de 4 cycles d’IIU ont été incluses dans l’étude.

Le taux cumulé de grossesses est de 47,1 %.

Les taux de grossesses chez les patientes ayant un dosage d’AMH inférieur à 1 ng/ml, est de 36,5 %/ 47,8 % chez les patientes ayant un dosage d’AMH normal.

Pour les auteurs, un taux bas d’AMH n’altère pas de façon significative l’efficacité des IIU et ne permet pas de priver les couples d’un accès à une assistance médicale à procréation intra-conjugale.

Un taux effondré d’AMH ne semble pas péjoratif pour la prise en charge en insémination intra-utérine – H. DRAPIER et coll. (poster n° 70 - FFER septembre 2014)
 


3 - Impact de l’AMH et de l’âge sur les taux de naissance en fécondation in vitro

O. POUGET et coll. (Centre AMP SAINT ROCH, MONTPELLIER) ont réalisé une étude rétrospective de janvier à décembre 2013 sur la corrélation entre les taux d’AMH et de l’âge et les taux de naissance en FIV.

Pour les auteurs, le taux d’AMH est corrélé à la réserve ovarienne, reproductible quelle que soit la date du cycle et d’un cycle à l’autre.

3775 cycles ont été analysés avec un nombre moyen d’embryons frais transférés de 1,85 et des taux d’AMH entre 0,4 et ≥ 2 ng/ml.

Dans leurs résultats, les auteurs notent que le nombre moyen d’embryons congelés pour une AMH comprise entre 0,4 et 2 ng/ml est de 0,38, alors que ce nombre est de 1,04 pour une AMH > 2 ng/ml.

De même, lorsque l’AMH < 2 ng/ml, le pourcentage de patientes bénéficiant d’une culture prolongée est significativement plus important.

En termes de naissance par transfert d’embryons frais, le taux de naissance par transfert est de 19,7 % lorsque l’AMH > 2 ng/ml / 14 % lorsque l’AMH < 2 ng/ml.

Les auteurs n’ont observé aucune naissance chez les patientes avec une AMH < 0,4 ng/ml après l’âge de 38 ans.

Cette étude confirme les données de la littérature comme quoi l’AMH ne paraît pas performante pour prédire les chances de grossesse en FIV.

Pour les auteurs, il est injustifié de récuser un couple en AMP sur les seuls résultats des marqueurs de réserve ovarienne, notamment chez les patientes âgées de moins de 38 ans.

Impact de l’AMH et de l’âge sur les taux de naissance en FIV – O. POUGET et coll. (poster n°83 - communication FFER septembre 2014 PARIS)

 
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