DHEA et traitement d’assistance médicale a la procréation : mythe ou réalité ?

K. YAKIN et coll. (Hôpital Américain d’ISTANBUL, Turquie) font le point, dans cet article, sur l’efficacité de la déhydroépiandrostérone (DHEA) administrée dans les traitements de fécondation in vitro chez les patientes dites « mauvaises répondeuses » ou présentant une insuffisance ovarienne.

Les études précédentes de MAMAS (2009), GLEICHER et BARAD (2010) ont évoqué l’intérêt de la supplémentation en DHEA pendant trois mois chez les femmes traitées pour infertilité et présentant des taux de FSH élevés, des taux d’hormones anti-mülleriennes (AMH) bas, ou des réponses inadéquates aux inductions d’ovulation lors de FIV.

Ces études ont néanmoins été souvent critiquées en termes de valeurs statistiques, biais de sélection et évidence de résultats.

La DHEA, stéroïde androgène, est utilisée dans certains pays notamment aux USA comme un « supplément alimentaire », une substance anti-aging et dans certains milieux sportifs, comme un « booster anabolisant ».

Les auteurs notent que les produits de DHEA disponibles aux USA ont une concentration variant de zéro à 150 % !

On connait les effets secondaires de l’usage à long terme de la DHEA : hirsutisme, chute de cheveu, acné…

A court terme, des effets sur les fonctions hépatiques et le métabolisme du cholestérol et du glucose ont été rapportés.

La DHEA a-t-elle un effet direct sur le « vieillissement ovarien » en augmentant le pool de follicules jusqu’au stade pré-antral ou en réduisant l’apoptose des follicules en voie de recrutement ?

C’est l’hypothèse de GLEICHER qui présente la DHEA comme le premier médicament qui, chez les femmes présentant une insuffisance ovarienne, augmente le nombre et la qualité ovocytaire, augmente le taux de grossesse et diminue le risque de fausses couches spontanées.

Mais les principales études en faveur d’une amélioration de la réponse ovarienne après DHEA sont toutes rétrospectives.

CASSON et coll. ont certes rapporté 5 cas de « mauvaises répondeuses » qui, après traitement par DHEA, voient un recueil ovocytaire augmenter (2,2 ovocytes/1), mais cette étude avait été également très critiquée (VAN WEENING et coll., 2001) pour des erreurs méthodologiques liées aux variations de quantité et de type de gonadotrophines administrées.

Dans une autre étude rétrospective, comparant les résultants des FIV chez
22 patientes traitées par DHEA à un groupe contrôle (n = 44), les résultats restent « surprenants », puisque le groupe censé présenter une insuffisance ovarienne a un taux de recueil ovocytaire de 9,6/11,7 ovocytes pour le groupe témoin !

Une étude menée récemment par WISER et coll. (2010) a montré que chez
33 patientes d’âge moyen inférieur à 42 ans, incluses dans un protocole de traitement par DHEA (75 mg par jour pendant 13,5 semaines), en cas de recueil ovocytaire inférieur 5, de qualité embryonnaire médiocre ou d’abandon de traitement, il n’y avait aucune différence significative entre le groupe traité par DHEA (n = 17) et le groupe contrôle (n = 16) en termes de niveau d’œstradiol, de recueil ovocytaire ou de qualité embryonnaire.

A ce jour, selon les auteurs, il n’y aucune évidence d’une action de la DHEA au niveau moléculaire, cellulaire ou tissulaire dans les modèles animaux ou humains.

Les auteurs estiment nécessaire que des études plus approfondies soient menées avant de recommander en routine l’usage de la DHEA chez les patientes « mauvaises répondeuses » ou présentant une insuffisance ovarienne dans le cadre d’un traitement de fécondation in vitro.

K. YAKIN and B. URMAN – Human Reproduction, volume 36, n°8, 2011 - DHEA as a miracle drug in the treatment of poor responders hype hope ? 

 
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