Troubles du cycle : et si c’était la prolactine ?

Les anomalies du cycle menstruel, telles que les aménorrhées (qu’elles soient primaires ou secondaires), spanioménorrhée ou autre toute perturbation, sont extrêmement fréquentes chez les adolescentes et femmes jeunes. Durant les 2 années qui suivent la ménarche, les cycles sont volontiers anovulatoires du fait de l’immaturité de l’axe hypothalamo-hypophyso-ovarien expliquant, dans la majorité des cas, les troubles observés. Passée cette période de maturation de l’axe gonadotrope, les cycles se régularisent. Aussi, la persistance des troubles impose, sans délai d’éliminer certaines causes organiques. L’hyperprolactinémie représente la perturbation hormonale la plus courante à l’origine de ces désordres menstruels. Les causes de cette élévation pathologique de la prolactine, en dehors de la grossesse et de la lactation, sont multiples allant du prolactinome, au simple stress en passant par les causes médicamenteuses. L’hyperptolactinémie peut apparaitre à tout âge et sa prévalence varie de 0,4% dans la population générale à 9-17% chez des femmes présentant des troubles menstruels. La prévalence chez les adolescentes et jeunes femmes a été peu évaluée, aussi une étude récente tente d’en déterminer la fréquence dans cette population.

Ainsi, 1704 patientes consultant pour des troubles du cycle ont été incluses dans cette analyse et réparties en 2 groupes selon leur âge: le groupe 1 était constitué de 1002 sujets de 11 à 20 ans et le groupe 2 de 702 jeunes femmes de 21 à 30 ans. Après interrogatoire et examen clinique, les patientes bénéficiaient d’un bilan hormonal détaillé et certaines d’une imagerie si elle était justifiée.

Les troubles du cycle pris en compte étaient : - une aménorrhée primaire (définie par une absence de règles à  l’âge de 14 ans sans apparition des caractères sexuels secondaires ou à 16 ans si ceux-ci étaient présents), - une aménorrhée secondaire avec absence de règles depuis plus de 3 mois, - une spanioménorrhée avec des cycles de plus de 35 jours chez les adultes et de plus de 45 jours chez les adolescentes, - toute autre anomalie des règles en abondance, durée, fréquence.

Parmi ces 1704 patientes, le trouble le plus fréquemment observé était une aménorrhée (48,3%). On constatait en effet la répartition suivante: aménorrhée primaire chez 19,2% dans le groupe 1 et 7,1% dans le groupe 2 et aménorrhée secondaire chez 29,1% et 41,2% respectivement. A l’inverse, on notait un taux significativement plus élevé de spanioménorrhée dans le groupe 2 ( 18,5% versus 9,8% pour le groupe 1).

Une hyperprolactinémie a été retrouvée chez 110 patientes (25 dans le groupe 1 et 85 dans le groupe 2) avec des taux moyen de 69,6 ng/ml et 235,4 ng/ml respectivement. L’hyperprolactinémie était une cause non négligeable d’aménorrhée secondaire (5,5% dans le groupe 1 et 13,8% dans le groupe 2) ce qui n’était pas le cas dans le cadre des spanioménorrhées.

Les étiologies retrouvées à l’origine de l’hyperprolactinémie étaient variées mais on notait plus de cas d’adénomes hypophysaires en cas d’aménorrhée secondaire dans le groupe 2. La prévalence globale était de 0,6% pour les micro adénomes (moins de 10 mm) et de 0,7% pour les macro adénomes (plus de 10 mm). L’hyperprolactinémie était retrouvée plus volontiers chez les plus de 20 ans et surtout en cas d’aménorrhée secondaire. Dans le groupe 2, les autres causes d’aménorrhées secondaires étaient d’origine supra-hypothalmique dans 47,4% des cas, 24,9 % en rapport avec une anovulation chronique et 12,5% en rapport avec une insuffisance ovarienne primitive.

Le diagnostic étiologique de l’hyperprolactinémie est une étape fondamentale du diagnostic puisqu’elle conditionne le traitement. La constatation d’un taux de prolactine élevé, contrôlé au moins à 2 reprises dans de bonnes conditions (à jeun après 15 minutes de repos au laboratoire) impose la réalisation d’une imagerie hypophysaire.

L’hyperprolactinémie n’est pas rare chez la jeune femme présentant des troubles menstruels et toute anomalie, en particulier s’il s’agit d’une aménorrhée secondaire, doit faire l’objet d’un dosage de la prolactine plasmatique. La mise sous contraception estro-progestative dans le but de régulariser le cycle serait une grossière erreur aggravant potentiellement un pathologie hypothalamo-hypophysaire.

Lee D-Y, Yoon B-K, et al. Prevalence of hyperprolactinzmia in adolescents and young women with menstruation-related problem. Am J Obstet Gynecol 2012;206:213.e1-5.

 
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