THM et risque cardio-vasculaire : la revue Cochrane réactualisée !

Les données concernant le risque cardio-vasculaire associé au traitement hormonal de la ménopause (THM) sont discutées. Les premiers éléments, issus des études d’observation, suggéraient qu’un bénéfice pouvait être attendu avec une réduction de l’incidence des maladies coronariennes, une des toutes  premières causes de mortalité. Cette notion, associée aux effets favorables sur la qualité de vie et le métabolisme osseux, explique l’engouement initial du corps médical et des femmes pour ce traitement. Depuis, le bénéfice sur le plan vasculaire a été remis en question par la publication d’études randomisées. Ces nouvelles données associées à la confirmation du faible accroissement  du risque carcinologique mammaire ont vite terni l’enthousiasme initial et fait abandonné probablement de façon excessive le recours au THM..

Une mise à jour de la revue Cochrane de 2013 vient d’être publiée permettant une mise au point de l’effet du THM sur les pathologies cardio-vasculaires. Cette revue incluant 19 essais porte sur un total de 40 410 femmes ménopausées et a pour but de déterminer les éventuelles différences entre le THM utilisé en prévention primaire ou secondaire et le THM utilisé tôt ou plus tard après le début de la ménopause. La plupart des femmes étaient américaines et en moyenne âgées de plus de 60 ans. Le THM, principalement composé d’estrogènes conjugués équins par voie orale et d’un progestatif de synthèse le MPA, avait été suivi selon les études entre 7 mois et 10,1 ans. Les objectifs secondaires étaient d’évaluer l’effet du THM en fonction : - de son délai d’initiation (plus ou moins de 10 ans après l’installation de la ménopause), - de l’âge des femmes (<60 ans ou >60 ans), - de la durée du traitement.

Les résultats de cette revue sont les suivants :

  • augmentation du risque d’AVC aussi bien en prévention primaire que secondaire : RR=1.24, (1.10-1.41 ; IC à 95 %)
  • augmentation des événements thromboemboliques veineux : RR=1.92, (1.36-2.69 ; IC à 95 %)
  • augmentation du risque d’embolie pulmonaire : RR=1.81, (1.32-2.48 ; IC à 95 %)
  • concernant les THM initiés moins de 10 ans après l’installation de la ménopause : la mortalité globale était inférieure : RR=0.70, (0.52-0.95 ; IC à 95 %), le risque de maladies coronariennes était inférieur : RR=0.52, (0.29-0.96 ; IC à 95 %) et celui de maladie thromboembolique accru RR=1.74, (1.11-2.73 ; IC à 95 %) comparativement au placebo ou à l’absence de traitement. Dans ce groupe il n’apparaissait pas d’augmentation significative du  risque d’AVC
  • concernant les THM initiés plus de 10 ans après l’installation de la ménopause : l’impact sur la mortalité globale et le risque de maladies coronariennes semblait faible mais il apparaissait un risque accru d’AVC RR=1.21  (1.06-1.38 ; IC à 95 %) et d’évènements thromboemboliques RR=1.96 (1.37-2.80 ; IC à 95 %)

Cette revue montre que le THM en prévention primaire ou secondaire n’apporte peu voire pas de bénéfice cardio-vasculaire et est à l’origine d’un risque augmenté d’AVC et de maladies thromboemboliques. Il est à noter cependant que la plupart des études concernant des femmes américaines souvent âgées de plus de 60 ans et dont le THM utilisait un estrogène oral (principalement des estrogènes conjugués équins) et un progestatif de synthèse (MPA). Les facteurs de risque vasculaire de ces patientes américaines représentent certainement un facteur  important : BMI de ces femmes souvent élevé, insulino-résistance probable … 
L’extrapolation à la population française et aux THM utilisés en France (principalement estrogènes par voie cutanée et progestérone naturelle ou assimilée) est de ce fait délicate. Les données de quelques études réalisées avec le schéma thérapeutique français sont rassurantes concernant le risque thromboembolique et peut-être sur celui d’AVC ischémique mais il s’agit d’études non randomisées. Il est vraisemblable qu’il existe des différences en fonction de la voie d’administration des estrogènes, les molécules utilisées pour l’estrogène et le progestatif, un effet durée et un effet âge d’où la notion de fenêtre d’intervention.

La mise en route d’un THM impose quoiqu’il en soit une grande prudence et dans tous les cas une évaluation, initiale et répétée au moins une fois par an, de la balance bénéfice/risque.

Hormone therapy for preventing cardiovascular disease in post-menopausal women. Boardman HMP, Hartley L, Eisinga A et al. Cochrane Database System Rev, 2015 Mar 10;3:CD002229.

 
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