Ces dernières années ont vu naître une polémique autour de la prescription des contraceptifs combinés oraux (COC) (tableau 1). De nouvelles études sembleraient confirmer le surcroit de risque thromboembolique des pilules de 3ème et 4ème génération comparativement aux plus anciennes (2). Leur déremboursement avait d’ailleurs été programmé pour septembre 2013. L’histoire s’est accélérée suite à la première plainte d’une jeune patiente victime d’AVC très largement relayée par le monde médiatique. Le déremboursement a été ainsi avancé à la fin du mois de mars 2013 et des recommandations émanant de l’ANSM (Agence Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé) ont été largement diffusées auprès des prescripteurs débordés par la vague de panique qui s’est emparée des patientes. Alors voici 10 recommandations s’intégrant dans les règles de bonnes pratiques pour réagir à ces inquiétudes tout en respectant les consignes des autorités.
1. Dédiaboliser la pilule et rappeler que le rapport bénéfices/risques reste positif pour tous les COC : - donner les chiffres du risque thromboembolique (3) et le mettre en rapport avec celui de la grossesse et - décrire les bénéfices secondaires des COC.
2. Prévenir de l’importance de ne pas interrompre brutalement un COCsans en avoir discuté au préalable avec un professionnel pour éviter la survenue de grossesse non désirée. Une COC bien tolérée depuis longtemps ne doit pas être systématiquement être modifiée mais la discussion doit être objective et claire avec la patiente. Le risque thromboembolique est maximal la première année et se stabilise ensuite tout en restant à un niveau supérieur à celui des non utilisatrices.
3. Dépister les facteurs du risque thromboembolique veineuxmais aussi artériel avant toute prescription de COC : un interrogatoire minutieux à la recherche notamment d’antécédent familial, d’un tabagisme… mais aussi un examen clinique rigoureux avec en particulier la prise du poids et de la pression artérielle représentant des temps clés. Tout antécédent personnel thromboembolique contre-indiquant de façon formelle et définitive toutes les contraceptions estro-progestatives.
4. Proposer un bilan biologique dès que l’examen clinique et/ou l’interrogatoire le justifie : la recherche d’une thrombophilie se limitant aux patientes ayant des antécédents familiaux thromboemboliques.
5. Opter pour un COC de 2ème génération lors d’une première prescription : le moindrerisque thromboembolique suggéré de ces COC justifiant, par précaution, leur utilisation en première intention face aux COC de 3ème et 4ème génération. Il faut noter que le risque veineux est également supérieur pour les contraceptions combinées utilisant des voies non orales d’administration : patchs et anneaux contraceptifs.
6. Informer du risque potentiel d’accident thromboemboliqueet des symptômes révélateurs : parmi les bénéfices et les risques exposés lors de la prescription d’une COC, le risque de phlébite et embolie pulmonaire doit être évoqué avec des mots simples et non angoissants.
7. S’autoriser le passage à un COC de 3ème ou 4ème génération en cas de mauvaise tolérance d’un COC de 2ème génération : certaines femmes vont voir apparaitre ou persister des effets secondaires, comme l’acné ou un problème pondéral: un passage à une autre génération peut être proposé pour améliorer la symptomatologie.
8. Dissuader d’interrompre pour reprendre régulièrement un COC : ce qui induit une augmentation du risque thromboembolique à chaque reprise de la COC.
9. Exposer les circonstances favorisantes imposant un arrêt du COC : un alitementprolongé, un plâtre des membres inférieurs, une chirurgie programmée …nécessitent l’avis d’un professionnel sur la conduite à tenir.
10. Profiter de chaque renouvellement de COC pour réévaluer la bonne toléranceet la justesse de la contraception choisie : chaque consultation doit être l’occasion de s’assurer de la compliance, de la bonne tolérance et de proposer les alternatives contraceptives hormonales ou non.
En matière de contraception plus que dans tout autre domaine, un strict respect des contre-indications, un choix attentif, une surveillance rigoureuse et un dialogue éclairé avec la patiente permettent d’éviter bon nombre de complications et d’assurer une observance optimale.
2. Plu-Bureau G, et al., Hormonal contraceptives : An epidemiological update, Best Practice & Research Clinical Endocrinology & Metabolism (2012), http://dx.doi.org/10.1016/j.beem.2012.11.002
Tableau 1. Les contraceptions orales combinées (COC) contenant de l’ethinyl-estradiol
Pilules contenant un progestatif de 1ère génération
Triella |
Triphasique |
Ethinylestradiol 35 mg + Norethistérone 0,5-0,75- 1 mg |
Pilules contenant un progestatif de 2ème génération
Minidril Ludeal Zikiale |
Monophasique |
Ethinylestradiol 30 mg + Lévonorgestrel 150 mg |
Leeloo Lovavulo Optilova |
Monophasique |
Ethinylestradiol 20 mg + Lévonorgestrel 100 mg |
Adepal Pacilia |
Biphasique |
Ethinylestradiol 30-40 mg + Lévonorgestrel 150-200 mg |
Trinordiol Daily Amarance Evanecia |
Triphasique |
Ethinylestradiol 30-40 mg + Lévonorgestrel 50-75-125 mg |
Pilules contenant un progestatif de 3ème génération
Cilest Effiprev |
Monophasique |
Ethinylestradiol 35 mg + Norgestimate 250 mg |
Cycleane 30 Varnoline Desobel Gé 30 |
Monophasique |
Ethinylestradiol 30 mg + Désogestrel 150 mg |
Varnoline Continu |
Monophasique |
Ethinylestradiol 30 mg + Désogestrel 150 mg (21 cps actifs +7 cps placebo) |
Carlin 30 Efezial 30 Felixita 30 Minulet Moneva |
Monophasique |
Ethinylestradiol 30 mg + Gestodène 75 mg |
Carlin 20 Efezial 20 Felixita 20 Harmonet Meliane |
Monophasique |
Ethinylestradiol 20 mg + Gestodène 75 mg |
Cycleane 20 Mercilon Desobel Gé 20 |
Monophasique |
Ethinylestradiol 20 mg + Désogestrel 150 mg |
Melodia Minesse Edenelle |
Monophasique |
Ethinylestradiol 15 mg + Gestodène 60 mg prise continue : 24 cps actifs + 4 cps placebo |
Tricilest Triafemi |
Triphasique |
Ethinylestradiol 35 mg + Norgestimate 180-215-250 mg |
Phaeva Tri-Minulet Perleane |
Triphasique |
Ethinylestradiol 30-40 mg + Gestodène 50-70-100 mg |
Pilules contenant un progestatif d’autres générations et pilules dites de 4ème génération
Belara |
Monophasique |
Ethinylestradiol 30 mg + Chlormadinone 2 mg |
Diane Evepar Holgyeme Lumalia Minerva |
Monophasique |
Ethinylestradiol 35 g + Acétate de cyprotérone 2 mg
|
Jasmine Convuline Drospibel 30 |
Monophasique |
Ethinylestradiol 30 mg + Drospirénone 3 mg |
Jasminelle Belanette Drospibel 20 |
Monophasique |
Ethinylestradiol 20 mg + Drospirénone 3 mg |
Jasminelle Continu |
Monophasique |
Ethinylestradiol 20 mg + Drospirénone 3 mg prise continue : 21 cps actifs + 7 cps placebo |
Yaz Rimendia |
Monophasique |
Ethinylestradiol 20 mg + Drospirénone 3 mg prise continue : 24 cps actifs + 4 cps placebo |
3. Risque Thromboembolique veineux : les chiffres…
- 5 à 10/ 100 000 femmes par an pour les non utilisatrices avec 2% de mortalité
- Ce risque est doublé pour les COC de 2ème génération
- Ce risque serait multiplié par 3 ou 4 pour les COC de 3ème et 4ème génération
- Ce risque est multiplié par 6 en cas de grossesses