Le risque de cancer du sein serait-il augmenté à la suite de certaines dysthyroïdies ?

Avec un chiffre de plus de 450 000 nouveaux cas par an en Europe, le cancer du sein reste le plus fréquent des cancers. Les hormones sexuelles endogènes et exogènes jouent un rôle important dans sa pathogénie. L’impact des hormones thyroïdiennes est, quant à lui, débattu. En effet, in vitro les hormones thyroïdiennes, à un niveau élevé, exercent une action estrogène-like avec une promotion de la prolifération cellulaire et une augmentation de l’angiogenèse. Ainsi, le risque de cancer du sein en cas d’hyperthyroïdie a déjà été évoqué dans certaines publications antérieures mais les données des études épidémiologiques publiées à ce jour ne permettent pas de conclure.

Une équipe européenne rapporte les résultats d’une vaste étude de cohorte menée au Danemark à partir de registres nationaux de santé. Ainsi, entre 1978 et 2013, les auteurs ont analysé les données de plus de 4 millions de femmes. Ils se sont attachés à répertorier les nouveaux cas d’hyperthyroïdie et d’hypothyroïdie ainsi que les nouveaux cancers du sein survenant plus d’un an après le diagnostic de la dysthyroïdie.

Le diagnostic d’hypothyroïdie a été établi chez plus de 60 000 femmes avec un âge médian de 71 ans lors de la découverte et celui d’hyperthyroïdie chez plus de 8000 femmes avec un âge médian de 70 ans.

La médiane de suivi était de 4,9 ans (1,8-9,5) pour l’hypothyroïdie. Celle-ci était associée à un risque diminué de cancer du sein : 0,94 (IC à 95% 0,88-1,00) comparativement à ce qui était attendu dans cette tranche d’âge.

La médiane de suivi était de 7,4 ans (3,1-13,5) pour l’hyperthyroïdie. Celle-ci était associée à un risque augmenté de cancer du sein : 1,11 (IC à 95% 1,07-1,16) comparativement à ce qui était attendu dans cette tranche d’âge.

Il n’apparaissait pas de différence selon l’étiologie de l’hyperthyroïdie ni en cas de traitement par Iode radioactif. L’accroissement du risque en cas d’hyperthyroïdie restait inchangé après ajustement sur certains facteurs tels que le stade du cancer, ses récepteurs hormonaux, l’âge, les comorbidités.

Cet article semble donc évoquer une modeste association positive entre hyperthyroïdie et risque de cancer du sein. Plusieurs processus physiopathologiques sous-jacents ont été évoqués. In vitro, il existe un effet prolifératif de la T3 (hormone thyroïdienne active) sur les cellules mammaires. Ainsi, la T3 se fixe sur un récepteur nucléaire et induit la transcription de gènes impliqués dans l’homéostasie énergétique et la prolifération cellulaire. Dans certaines lignées cancéreuses, la T3 et les estrogènes stimulent de façon synergique la prolifération cancéreuse.

Dans l’état actuel des connaissances et malgré la publication de cette vaste étude de cohorte, il semble très prématuré de faire de l’hyperthyroïdie un nouveau facteur de risque du cancer du sein malgré des hypothèses physiopathologiques intéressantes !

Sogaard M, Kormendiné Farkas D, et al. Hypothyroidism and hyperthyroidism and breast cancer risk : a nationwide cohort study. European journal of endocrinology.2016 ; 174 : 409-414.

 
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