IMC, activité physique et audition : des relations inattendues ?

Des troubles auditifs touchent 1/3 des femmes à la cinquantaine et 2/3 des femmes après 60 ans avec des conséquences majeures en termes de bien-être avec altération de la communication et des relations sociales. L’obésité et ses conséquences (maladies cardio-vasculaires, accidents vasculaires cérébraux, diabète, hypertension, dyslipidémies…) pourraient compromettre l’irrigation de la strie vasculaire et altérer ainsi la fonction cochléaire. A l’opposé, un bon niveau d’activité physique protègerait contre la perte d’audition par des effets bénéfiques sur l’endothélium vasculaire cochléaire associés à une amélioration de la détoxification des radicaux libres et à une réduction des phénomènes inflammatoires.

Des études transversales antérieures évoquent un plus grand risque de perte auditive avec l’âge chez les sujets les plus ronds et les moins actifs

Une équipe américaine a cherché à analyser, de façon prospective, au sein de la cohorte de la Nurses’ Health Study II, l’association entre le risque de troubles auditifs et les facteurs cités plus haut que sont l’obésité et l’activité physique.

Ainsi, 68 421 femmes ont été suivies et interrogées entre 1989 et 2009. Après un suivi de plus d’1.1 millions d’années-femmes, 11 286 cas de perte de l’audition ont été authentifiés.

Les plus forts IMC et les tours de taille les plus élevés étaient associés à un risque auditif. Le risque de perte de l’audition était estimé à 1.25 (IC à 95% 1.14-1.37) chez les  femmes dont l’IMC était supérieur à 40 kg/m2 comparativement à celles avec un IMC <25 kg/m2.

Ce risque était de 1.27 (IC à 95% 1.17-1.38) pour un tour de taille supérieur à 88 cm comparativement aux femmes avec un tour de taille inférieur à 71 cm. Cette majoration du risque persistait après ajustement sur l’IMC évoquant un rôle majeur de l’adiposité abdominale.

Les femmes les plus actives, à l’inverse, voyaient leur risque diminué avec un chiffre à 0.83 (IC à 95% 0.78-0.88) comparativement aux plus sédentaires. L’ajustement sur l’IMC et le tour de taille n’atténuait que très modérément ces résultats suggérant une action propre de l’activité physique et non exclusivement via son rôle sur le poids et la composition corporelle.  La marche 2h chaque semaine suffisait à réduire ce risque. La course à pied ou les activités sportives plus intensives ne semblaient pas apporter de bénéfice supplémentaire dans ce domaine.

Les mécanismes physiopathologiques sous-tendant la relation entre activité physique, obésité et ouïe comprennent des phénomènes hypoxiques avec ischémies, le stress oxydatif, la formation de déchets toxiques avec mort cellulaire au niveau cochléaire. L’obésité favorise également l’athérosclérose avec troubles de la vascularisation cochléaire. L’activité physique pourrait améliorer la fonction endothéliale avec vasodilatation et meilleure perfusion de la strie vasculaire.

Ces données permettent d’envisager des stratégies de prévention «simples » à partir de règles hygiéno-diététiques déjà approuvées dans d’autres domaines. Après la prévention cardio-vasculaire, métabolique, osseuse, voire carcinologique, voilà un argument de plus pour inciter nos patientes à bouger plus et manger sainement !

 

Curhan SG, Eavey R, Wang M, Stampfer M, Curhan GC.  Body mass index, waist circumference, physical activity, and risk of hearing loss in women.  The Am J of Med, 2013;126:1142.e1-1142.e8.

 
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