Efficacité, risques et tolérance d’une contraception orale à la drospirénone seule

Cent millions de femmes dans le monde utilisent une contraception estroprogestative (COP). Ces contraceptions combinées sont associées à une augmentation du risque vasculaire à la fois  thromboembolique veineux et artériel. Les contraceptions progestatives (CP), à l’exception du MPA injectable, n’augmentent pas ce type d’accidents et devraient être privilégiées chez un plus grand nombre de femmes. L’utilisation des CP actuellement commercialisées est souvent limitée en raison de leurs effets secondaires avec, en particulier, un mauvais contrôle du cycle. Un autre frein à leur prescription est le délai de prise autorisé en cas d’oubli : la CP à base de lévonorgestrel  impose un délai maximal de 3 heures. Plus récemment, la CP à base de désogestrel, qui autorise 12 heures de délai, offre un réel progrès mais le profil des saignements peut constituer une barrière à son utilisation. Une nouvelle CP à base de drospirénone est actuellement testée ; dérivée de la spironolactone, cette molécule possède une action antiminéralocorticoide et antiandrogénique. Les études de pharmacologie ont permis de déterminer que la posologie de 4mg/ jour entraine une inhibition de l’ovulation identique au 75 microgrammes de désogestrel. La plaquette de pilule comporte 24 jours actifs et 4 jours de placebo visant à améliorer le contrôle du cycle. 2 études sont présentées ici : la première est une étude de phase III (1), la seconde vérifie la persistance de l’inhibition de l’ovulation malgré des décalages de 24 heures dans la prise des comprimés (2).

 

Efficacité et tolérance

Une étude de phase III prospective, multicentrique européenne a été menée pour apprécier l’efficacité, les risques et la tolérance de cette nouvelle CP (1). 713 femmes ayant besoin d’une contraception, âgées de 18 à 45 ans, ont participé à l’étude programmée sur 13 cycles de pilule soit 7638 cycles de drospirénone.

Le premier objectif était de déterminer l’efficacité : l’indice de Pearl global était de 0,51 (IC à 95% : 0,1053-1,4722), après ajustement sur la sexualité ou l’âge des femmes, cet indice restait quasi similaire respectivement 0,5423 pour une sexualité « active »et 0,7052 pour les femmes de moins de 35 ans.

Le second objectif était d’évaluer la tolérance, en particulier le profil des saignements. Des saignements prévisibles durant les 4 jours de placebo survenaient chez 47% des patientes durant le cycle 1, 37% cycle 6 et 24% cycle 13. Les saignements imprévus en dehors de ces 4 jours : 49% cycle 1, 28% cycle 6 et 23% cycle13. La durée des saignements passait de 3 jours durant le  cycle 1,  à 1,3j cycle 6 et 1j cycle 13.

Aucun accident grave notamment MVTE ou cardiovasculaire n est survenue alors même que 14,5% avait au moins un facteur de risque.

Parmi les effets secondaires décrits potentiellement en rapport avec la drospirénone (21%) : acné, métrorragies, céphalées…occasionnant l’arrêt prématuré de l’étude chez 12,3% des femmes. 4,2% arrêtait en raison de saignements en comparaison de 22,5% pour  la CP à base de désogestrel et de 18% pour celle à base de lévonorgestrel dans d’autres études.

Il n’apparaissait pas de prise de poids avec même perte de 1kg en moyenne chez les femmes les plus fortes à l’entrée (IMC 30kg/m2). La pression artérielle diminuait modestement chez celles qui avaient une systolique > 130 et / ou une diastolique > 85 à l’entrée dans l’étude.

Les limites de l’étude sont nombreuses en raison de la méthodologie n’offrant pas de comparatif et du mode déclaratif choisi. D’autres études sont bien sur nécessaires avant de valider cette molécule comme une option contraceptive efficace et mieux tolérée que les précédentes CP.

 

Inhibition de l’ovulation persistante malgré des « oublis » de 24 heures

La seconde étude permet de rassurer concernant les oublis potentiels dans la prise des comprimés. L’inhibition de l’ovulation lors de la prise des CP est de de l’ordre de 60 à 70% variable selon les femmes. Leur efficacité contraceptive est de ce fait plus liée aux effets périphériques du progestatif notamment sur la glaire. Cette action est brève, aussi un oubli de plus de 3 heures dans la prise du comprimé en compromet  l’efficacité. La CP contenant du désogestrel offre plus de flexibilité dans la prise (12 heures de décalage) du fait du maintient de l’inhibition de l’ovulation.

Une étude a été menée chez 127 femmes âgées de 18 à 35 ans afin d’analyser le risque de décalage de 24 heures dans la prise de CP contenant 4 mg de drospirénone (2). Le caractère ovulatoire de leurs cycles avait été confirmé dans l’observation d’un cycle pré-thérapeutique. Les patientes ont été randomisées en 2 groupes. Dans le groupe A, la prise des comprimés était régulière durant la première plaquette puis  4 décalages de 24 heures intervenaient à J3-J6-J11 et J22 lors de la seconde plaquette. Dans le groupe B, les mêmes décalages étaient imposés lors de la première plaquette alors qu’on s’assurait de l’absence d’erreur de prise au cours de la 2ème plaquette.

Des échographies folliculaires et dosages de progestérone plasmatique  réalisés tous les 3 jours permettaient de dépister  une éventuelle ovulation. Le taux global d’ovulation était de 0,8% sans différence entre les 2 groupes. Une seule femme (du groupe A) avait ovulé durant l’étude avec cependant des taux de progestérone bas évoquant une ovulation de mauvaise qualité.

Cette étude semble donc accorder à la CP contenant 4 mg de drospirénone (24/4) une très bonne  efficacité contraceptive avec une inhibition de l’ovulation  maintenue malgré des décalages de 24 heures dans la prise. Cela constituerait un réel progrès par rapport aux CP actuellement commercialisées.

 

  1. D Archer, H-J Ahrendt, D Drouin. Drospirenone-only oral contraceptive: results from a multicenter noncomparative trial of efficacity, safety and tolerability. Contraception. 2015; 92: 439-444.
  2. I J Duijkers, D Heger-Mahn, D Drouin, E Colli, S Skouby. Maintenance of ovulation inhibition with a new progestin-only pill containing drospirénone after scheduled 24h-h delays in pill intake. Contraception. 2016; 93: 303-309.

 
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