Contraception orale et mortalité : la Nurses’ Health Study 36 ans après !

La Nurses’Health Study a été mise en place en 1976 dans le but de suivre, en particulier, les conséquences sur le long terme de la contraception orale dans une cohorte d’infirmières américaines. Nombreuses études ont évalué les risques et bénéfices de la contraception orale. Maintenant, soit plus de 50 ans après son introduction sur le marché, il est possible de déterminer ses principaux impacts sur la santé et l’estimation de la mortalité en représente un élément majeur.

Les patientes de cette cohorte étaient contactées selon un rythme biennal afin de mettre à jour leur utilisation de contraceptifs et leurs pathologies.

Sur les 121 577 femmes ayant fourni des informations sur leur contraception, 52,3% n’avaient jamais eu recours à une contraception orale, les autres l’ayant utilisée de façon variable. La durée moyenne d’utilisation était de 4,1 ans. 

Après un suivi de 36 années et 3,6 millions de personnes/années, les auteurs ont relevé 31 286 décès : 11781 par cancer, 6032 de maladies cardio-vasculaires, 855 de maladies digestives, 1084 décès accidentels ou de morts violentes, 9212 d’autres causes définies et 4381 de cause indéterminée.

Globalement, la mortalité toutes causes confondues n’était pas différente chez les femmes ayant utilisé la contraception orale. On notait cependant un plus fort taux de morts accidentelles ou violentes (HR 1.20 IC à 95% 1.04-1.37) principalement par suicide (1.41 IC à 95% 1.05-1.87).

L’association à d’autres causes de décès n’était pas significative y compris pour les décès par cancer du sein (1.08 IC à 95% 0.98-1.18), par cancer de l’ovaire (0.86 IC à 95% 0.74-1.00), par accident vasculaire cérébral (0.90 IC à 95% 0.80-1.01).

En revanche, les longues durées d’utilisation étaient associées à une augmentation des décès par cancer du sein (P<0.0001) et à une diminution de ceux liés à un cancer de l’ovaire (P=0.002). L’augmentation de la mortalité par cancer du sein disparaissait 10 ans après l’arrêt de la contraception orale.

Un des mécanismes évoqués par les auteurs implique le rôle des estrogènes et des progestatifs dans la prolifération cellulaire mammaire.

Des études antérieures semblaient mentionner un effet protecteur des troubles de l’humeur et syndromes dépressifs sous contraception orale ; le plus fort taux de morts violentes, en particulier par suicides, retrouvé ici reste donc sans explication. Cependant, les décès par morts violentes restent nettement moins fréquents (n=935 dont 234 suicides) que les morts d’autres causes, en particulier cardiovasculaire (n=6032).

Les résultats publiés dans cette étude concernent les pilules les plus anciennes de première et deuxième générations mais ne peuvent être extrapolés aux formulations plus récentes contenant un progestatif de 3ème ou autre génération.

Il convient de ne jamais oublier que le rapport bénéfice/risque des contraceptifs oraux reste toujours positif avec, bien sûr, principalement la prévention des grossesses non désirées mais aussi des bénéfices secondaires comme l’amélioration de la dysménorrhée, de l’acné, du syndrome prémenstruel …

 

Charlon BM, Rich-Edwards JW, Colditz GA, et al. Oral contraceptive use and mortality after 36 years of follow-up in the Nurses’Health Study: prospective cohort study. BMJ 2014;349:g6356 doi:10.1136

 
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