Association entre utilisation prolongée de contraceptifs oraux (CO) et risque de complications de la maladie de Crohn dans une large étude nationale

La maladie de Crohn (MC) est une maladie inflammatoire  chronique de l'appareil digestif  dont les différents phénotypes sont répertoriés dans la classification de Montréal selon l’âge de début du diagnostic, la localisation de la maladie, la gravité (occlusion-perforations-fistules-manifestations extra-intestinales)

Plusieurs études ont déjà établi une relation entre la prise de CO et le risque de survenue de MC mais il s'agit de la première évaluant l'effet de la prise de CO sur l'évolutivité de MC.

A partir du registre national suédois, 4063 patientes atteintes de MC ont été identifiées  entre juillet 2005 et décembre2013. Leur âge était compris entre 16 ans et 51ans. Les patientes avaient eu au moins deux manifestations cliniques permettant  d'établir le diagnostic de MC mais n'avaient jamais subi d'intervention chirurgicale pour cette pathologie.

482 cas d'interventions chirurgicales ont été identifiés à partir de ces registres  chez les 4063 patientes  atteintes de MC contribuant à un suivi de 260 911personnes-mois sur un suivi de 58 mois.

Le registre des prescriptions médicamenteuses suédois a permis de préciser pour chaque patiente la durée cumulative de prise de CO et la dose cumulée journalière (DDD)

Il n'y avait pas de différence concernant la parité, le niveau d'éducation et la région d'origine entre les anciennes utilisatrices (AU), celles qui n'avaient jamais utilisé  de CO (JU) et les utilisatrices en cours (CU) de CO.

Le principal critère d'exploration était l'acte chirurgical lié à la MC et le critère secondaire était la nécessité de traitement d'une poussée de la MC par corticoïdes.

Le risque d'un acte chirurgical était plus élevé chez les AU et les CU que chez les JU  bien que non significatif ; il augmente avec la durée de la CO et avec la quantité de CO reçue.

Pour les femmes ayant pris une CO pendant une durée supérieure à 3 ans,  le risque d'un acte chirurgical est significativement plus élevé que chez les non utilisatrices : RR=1.68   (1.06-2.67).

On estime que pour 83 patientes atteintes de MC et recevant pendant au moins une année une  CO,  on aboutit à une intervention chirurgicale supplémentaire.

Quels étaient les types d’interventions chirurgicales réalisées?

Dans 80% des cas, il s'agissait d'interventions intestinales, le reste concernait des interventions péri-anales (fistules).

Sur les 4063patientes suivies, on recense 239 résections iléo-caecales, résections de l'intestin grêle, 54 colectomies totales  avec iléostomies.

Le type de CO utilisé  influence-t-il le risque de chirurgie ?

La réponse est positive puisque le risque d'acte chirurgical n'augmente pas en cas d'utilisation prolongée d'une contraception progestative pure. De même, l’utilisation d'un stérilet contenant un progestatif ne semble pas avoir d'influence.

En ce qui concerne le deuxième d'évaluation, c'est à dire la prescription d'un traitement corticoïde, les auteurs ne retrouvent pas de différence entre les femmes n'ayant jamais utilisé de CO et les utilisatrices.

Sur le plan des mécanismes invoqués, plusieurs hypothèses sont envisagées : les estrogènes pourraient altérer la barrière intestinale, modifier le microbiome intestinal  en créant des désordres auto-immuns  et avoir un effet prolifératif cellulaire au niveau intestinal.

 

Conclusion

Cette large étude d'analyse suédoise permet de conclure que l'utilisation d'une CO combinée  prolongée augmente  le risque d'intervention chirurgicale chez les patientes atteintes de maladie de Crohn.

Le choix de la contraception chez une patiente atteinte de MC devra donc tenir compte de ces données et la CO de type combiné doit être évitée.
 

Khalili H,  Granath  F, Smedby KE, et al. Association between long-term oral contraceptive use and risk of Crohn’s disease complications in a nationwide study. Gastroenterology 2016, : doi :10.1053/j.gastro.2016.02.041.

 
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