Tabagisme actif voire passif en tant que facteur de risque du cancer du sein

Plusieurs études expérimentales avaient montré que des substances toxiques issues de la fumée de cigarettes étaient susceptibles d’induire des tumeurs mammaires. Cette relation semblait confortée par la détection de mutations spécifiques du gène de la p53 dans le tissu mammaire de fumeuses. Les études épidémiologiques publiées jusque là ne retrouvaient pas d’association précise et l’alcool semblait être un facteur confondant essentiel. Des analyses plus récentes mettaient en évidence le rôle du tabac, indépendamment de l’alcool, notamment pour le tabagisme de longue durée et débuté précocement. Le tabagisme passif, quant à lui, avait été incriminé principalement sur le risque de cancer avant la ménopause et cela pour les femmes les plus lourdement exposées.

Les auteurs rapportent ici les données issues de l’étude WHI qui comportait un questionnaire très détaillé du tabagisme actif et passif. Dans cette étude d’observation, 3520 cas de cancers invasifs du sein ont été diagnostiqués durant une moyenne de 10,3 années de suivi.

Les anciennes fumeuses avaient un risque de cancer augmenté de 9% par rapport à celles n’ayant jamais fumé. Ce risque était accru de 16% chez les fumeuses qui fumaient encore lors du diagnostic: le risque était d’autant plus élevé que le tabagisme avait débuté tôt, était important et ancien. Cet accroissement du risque persistait jusqu’à 20 ans après l’arrêt du tabac, avec une risque progressivement décroissant.

Parmi les non fumeuses victimes d’un tabagisme passif, seules les femmes les plus exposées (plus de 10 ans durant l’enfance, plus de 20 ans au sein leur vie familiale et plus de 10 ans au cours de leur vie professionnelle) voyaient leur risque de cancer du sein augmenté de 32% comparativement à celles non soumises à ce facteur. Il ne semblait pas exister de relation dose-réponse dans ce cadre.

Une tendance, cependant non significative, apparaissait avec une augmentation des cancers de type lobulaires et des cancers hormono-dépendants chez les fumeuses (RE+ et RP+).

Ces résultats sont concordants avec ceux d’autres études récentes rapportant un risque augmenté de 20 à 50% d’autant que le tabagisme initié tôt (avant la première grossesse) est ancien et intense.

L’association tabac-cancer du sein est biologiquement plausible surtout quand l’exposition a lieu durant certaines périodes « critiques » : principalement la période depuis la puberté jusqu’à la première grossesse menée à terme qui permet aux cellules épithéliales mammaires d’achever leur différenciation. Des modèles animaux ont bien montré la sensibilité particulière du tissu mammaire à l’exposition de carcinogènes entre la puberté et la première grossesse menée à terme. Chez la femme adulte, on retrouve un risque accru de cancer du sein lorsque la glande a été soumise à des irradiations durant la période post-pubertaire.

Ces données confirment la nocivité du tabagisme avec un impact sur le risque carcinologique mammaire, surtout s’il est débuté précocement après la puberté, période de particulière fragilité du tissu glandulaire mammaire, et poursuivi longtemps.

J Luo, K Margolis, J Wactawski-Wende, K Hom, C Messna, M Stefanick, H Tindle, E Tong, T Rohan. Association of active and passive smoking with risk of breast cancer among postmenopausal women: a prospective cohort study. BMJ 2011;342:d1016.

 
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